Ça y est, tout le monde a généré sa petite image Ghibli et s’est senti pousser les ailes d’un artiste ? On peut revenir un peu sur Terre et parler de vrais problèmes, ou bien ?
Disons-le clairement : l’IA générative artistique porte en elle les germes d’un fascisme nouveau. Un fascisme si frustré de ne pas savoir dessiner correctement ou même de passer plusieurs années d’études à apprendre qu’il a préféré coder quelques lignes pour voler et s’approprier le travail d’autrui et qualifier cela d’art ou d’avancée technologique. Pour reprendre les mots de Ian Malcolm, ils étaient si préoccupés par la question de savoir si cela était possible ou pas techniquement qu’ils ne se sont pas posé la question de savoir s’ils devaient le faire. Aujourd’hui, l’IA générative apporte plus de problèmes qu’elle n’en résout. La première photo générée, postée sur X, montrant de la fumée s’échappant du Pentagone, a causé un mini-krach boursier.
Des millions de personnes s’en réfèrent à ces IA, devenues de nouvelles Pythies de Delphes à qui on demande tout et n’importe quoi, mais dont on ne vérifie pas le CV. Qu’importe si elles ne savent pas ce qui s’est passé en Chine en 1989 ou si elles affirment que le 6 janvier 2021 était une révolte légitime. On n’ouvre plus de livres, on s’en remet à la machine, à des presses-boutons, à des prompts. On tombe dans l’ignorance crasse de la fainéantise parce qu’un jour, un connard n’a pas été capable de prendre des notes pour résumer une réunion de 15 minutes et qu’il s’est senti obligé de compenser son incomparable bêtise congénitale par une IA qui serait capable de faire ce travail élémentaire à sa place.
Le fascisme commence quand on arrête de penser par soi-même.
Le fascisme pense pour vous.
Don’t Think, Ask Grok.
L’IA générative n’a été inventée que dans un seul but : s’attaquer aux artistes, aux gens qui pensent, qui créent, qui se lèvent et qui projettent dans leurs écrits, leurs toiles, leurs films, leurs rêves les plus fous, leur colère contre le monde, leurs désespoirs et leurs espoirs. Combien de livres ont façonné des vies, combien de films ont provoqué des vocations, combien de toiles ont choqué, énervé. L’art a de cela qu’il est unique, humain. En lui enlevant cela, on lui enlève ce qui fait son unicité : son âme. En niant son existence, en le réduisant à des prompts, le fascisme mène là une autre bataille, idéologique : l’uniformisation de la culture, de la pensée, et la fin de toute pensée critique.
En parlant de pensée critique, il suffit de voir le nombre d’émissions ou de journaux de satire politique qu’on a stoppés ces dix dernières années, Siné Mensuel le mois dernier. Pour reprendre les mots du Festival du dessin de presse et de la satire, « La première censure est aujourd’hui une censure économique ». Derrière la censure, il y a un pouvoir. La satire déshabille ce pouvoir, qu’il soit économique, politique ou militaire. Elle le moque, elle le ridiculise. Au siècle dernier, Daumier moquait Louis-Philippe sous forme de Gargantua et écopa de six mois de prison ferme. Les choses ont-elles vraiment changé depuis 1832 ? Les Guignols, « C’est Encore Nous » et « Le Grand Dimanche Soir » n’ont pas disparu par magie. Il y a quelques semaines, un dessinateur de presse postait un dessin sur X et écopait d’un avertissement pour avoir croqué Musk défavorablement. Une dessinatrice de presse du Washington Post démissionnait après un dessin jugé inapproprié par son propriétaire, Bezos. Et absolument tout le monde s’en fout parce que c’est pas son problème, il y a quand même des choses plus importantes.
On pourrait lister les pressions politiques et économiques sur les autres médias indépendants. Beaucoup râlent parce que la presse appartient à des milliardaires. Combien ont déjà ouvert « les Jours » ?
Dernier point : d’aucuns nous ont aussi demandé si nous voulions quitter X. Nous ne quitterons pas X. Nous n’avons aucune intention de quitter X volontairement. Notre ambition est de nous faire bannir de X.
Fuck Grok.
https://www.legorafi.fr/2025/04/01/poisson-artificiel/
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