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En fait, personne n’aime les éjacs

Crème vanille. Décharge finale. Money shot. Peu importe comment vous l’appelez, je pense qu’on peut s’accorder sur le fait que le sperme masculin est la graisse lubrifiante qui fait tourner tout Internet. C’est gluant, c’est salissant et ça se répand partout. Parcourez n’importe quel site porno pendant une demi-seconde et vous trouverez des vidéos de femmes en train de se faire éjaculer dans le cou, le dos, le vagin et la raie, bref, sur toutes les parties du corps. Mais existe-t-il une seule personne sur terre qui aime vraiment ça ?

Une nouvelle étude, publiée dans la revue universitaire Sexes et judicieusement intitulée As Long as It's Not on the Face (Tant que ce n’est pas sur le visage), suggère que les gens sont moins enthousiastes à l’idée de se faire éjaculer sur la gueule que ce que l’industrie porno voudrait bien nous laisser penser. « Aucune étude antérieure ne s’est intéressée aux perceptions et aux préférences du public en ce qui concerne les cumshots », écrit l’auteur de l’étude, Eran Shor, de l’université McGill. Pour info, « cumshot » est le terme générique pour désigner une scène d’éjaculation sur le corps d’une autre personne. Il a interrogé plus de 300 spectateur·ices de films pornos de différentes origines démographiques et culturelles et a constaté que « la plupart ne se soucient pas de l’éjaculation masculine ou de son emplacement, ou préfèrent qu’elle se produise dans le vagin de la partenaire féminine ». Shor suggère également que beaucoup de spectateur·ices trouvent « dérangeantes » les scènes de cumshot dans la bouche ou sur le visage.

Je sais qu’il est préférable de ne pas s’aventurer sur le terrain de la Guerre des sexes, mais le fait que beaucoup trouvent les cumshots dérangeants ne devrait pas étonner grand monde. Ça fait des décennies qu’une multitude d’universitaires féministes affirment que la pornographie, parce qu’elle est généralement réalisée par et pour des hommes, reflète les attentes patriarcales dominantes en matière de sexualité féminine, faisant de l’éjaculation un sujet particulièrement épineux. Dans son article de 2005, auquel Shor se réfère dans l’étude, Terrie Schauer, de l’université Simon Fraser de Vancouver, affirme ceci : « puisque les hommes sont représentés en train de décharger sur le visage, les seins ou les fesses de leur victime — c’est-à-dire sur les espaces corporels qui sont les signifiants de la féminité — on peut dire que l’éjaculation dégrade métaphoriquement la féminité. »

Bien entendu, ce point de vue n’est pas partagé par toutes les femmes, ni par toutes les féministes. Toutefois, ça n’a pas empêché le récit général d’aller dans une certaine direction, à savoir : « les féministes pensent probablement que les cumshots sont dégradants, mais les mecs doivent forcément kiffer ça. » À première vue, les habitudes de consommation du porno semblent confirmer cette idée. Une étude réalisée en 2021 a révélé que 24% des vidéos les plus regardées sur Pornhub comportaient une éjaculation masculine sur le visage d’une femme. Il semble donc que la prolifération des cumshots dans la pornographie répond simplement à une demande masculine.

Or cette étude révèle que ce n’est pas le cas. Interrogés sur leurs préférences, un échantillon représentatif d’hommes et de femmes, hétéro ou non, ont dénoncé la pratique du cumshot – pas uniquement les féministes anti-porno, donc. Shor rapporte que la plupart des personnes interrogées ne s’en soucient pas ou n’ont pas émis de préférence (27%), voire préfèrent que les hommes éjaculent à l’intérieur du vagin de la performeuse (38% de toutes les personnes interrogées et 48% des femmes de l’échantillon). Seuls 9% environ ont déclaré préférer voir une femme se faire éjaculer sur le visage.

Pour quelques personnes interrogées, en particulier des hommes hétérosexuels, il s’agit moins d’une question de goût que d’une question de timing. Liam, un Canadien hétérosexuel de 25 ans, a déclaré lors de l’étude : « Je ne suis pas le genre à regarder jusqu’à la fin, donc je n’ai pas de préférence ». Ivan, 22 ans, étudiant russe hétérosexuel, a tenu des propos similaires : « J’arrive jamais jusque-là, donc je m’en fous ». D’autres ont des opinions plus tranchées sur l’endroit où le type doit décharger. Christine, 19 ans, étudiante bisexuelle française, a déclaré qu’elle préférait l’éjaculation vaginale, « là où je ne la vois pas ». Pour Julian, un Canadien homosexuel de 20 ans, les artistes masculins devraient éjaculer « sur leur propre corps ; juste, gardez ça pour vous ».

Je ne vais pas sauter sur une table et proclamer que cet échantillon de quelques centaines d’individus est la preuve irréfutable que personne n’aime les cumshots, mais il semble justifier l’idée qu’une grande partie du porno se résume à la vie sexuelle d’un garçon de 13 ans qui viendrait d’apprendre tout ce qu’il peut faire avec son zgeg. Jizz ! Boum ! Du sperme ! Du sperme ! Trop chouette ! Maintenant, ferme l’onglet, retourne à ton devoir de maths et ne pense surtout pas à la fille qui est en train de se laver le visage dans le lavabo de la salle de bain. Ou bien c’est juste moi qui suis de la vieille école ?

« Je suis anti-cumshots, je les trouve un peu dégoûtants », déclare Bethany, 28 ans, dont le nom a été modifié pour des raisons de confidentialité, comme d’autres personnes dans cet article. Fiona, 29 ans, va dans le même sens. « Je pense que c’est dégueulasse et je ne veux pas de ça sur mon visage, merci mais non merci. » Et les femmes ne sont pas les seules à partager ces sentiments. « C’est un manque de respect », affirme clairement David, 31 ans. D’autres émettent des critiques plus pratiques. « C’est une contrainte, dit Tom, 34 ans. C’est pas juste d’obliger les femmes à se laver le visage. »

Fiona est d’avis que l’expression « cumshots are hot » est un « mensonge répandu par les hommes », né tout au plus d’une nécessité cinématographique. « Il s’agit plutôt d’un moyen pour montrer visuellement la conclusion dramatique d’un récit pornographique », suggère-t-elle.

Ça nous ramène au cœur du problème, car le fait que vous aimiez ou détestiez les cumshots dans votre propre lit n’est pas très important dans le grand schéma des choses (après tout, vous faites ce que vous voulez chez vous). Ce qui est intéressant, c’est de savoir pourquoi le porno donne l’impression que le sexe doit se terminer par, eh bien, un final façon cumshot.

« La prévalence des cumshots dans la pornographie grand public soulève une question intrigante », explique à VICE Eldin Hasa, neuroscientifique et expert en comportement humain. « Si seule une minorité de spectateurs exprime une préférence pour cet acte, pourquoi ces éjaculations sont-elles si courantes dans l’industrie ? »

L’une des explications possibles, selon lui, est que l’industrie porno « répond à certaines notions préconçues de ce qui est attendu, en perpétuant l’idée que l’éjaculation masculine sur le visage ou dans la bouche d’une femme est un élément standard des rapports sexuels ».

C’est un cercle vicieux, ajoute-t-il. « La prévalence des cumshots dans les vidéos pornos a le potentiel de façonner les perceptions et les attentes des spectateurs concernant les rapports sexuels réels, déclare Hasa. D’un point de vue de l’éducation sexuelle, il est essentiel d’évaluer de manière critique la représentation des actes sexuels dans la pornographie et de rectifier toute désinformation ou attente irréaliste qu’elle pourrait véhiculer. »

Selon l’éducatrice sexuelle Emilie Lavinia, le véritable problème réside dans le fonctionnement des sites pornographiques gratuits. « La pornographie sur les sites de tubes suit des schémas algorithmiques, explique-t-elle, donc plus vous voyez quelque chose, plus vous y serez exposé. C’est pourquoi une page d’accueil sur un site gratuit qui propose des vidéos de cumshots générera plus de clics et augmentera la demande pour ce type de vidéos. » Mais d’après elle, il s’agit d’une « fausse économie ». Lavinia revient à l’étude récente pour étayer son argument. « L’étude montre que si le groupe démographique de l’échantillon ne cherche généralement pas ce type de contenu érotique, il lui est quand même proposé sur les sites pornographiques gratuits. »

« Un aspect crucial de toute cette discussion est de savoir si l’éjaculation masculine peut être jouée et filmée d’une manière qui ne serait pas considérée comme dégradante pour les femmes », déclare Hasa. Pour Lavinia, cela dépend de l’intention et du langage de la scène. « Si la scène se veut humiliante et que le sperme est présenté comme étant sale, vous pourriez supposer que la personne qui reçoit ce cumshot est censée en être humiliée », dit-elle. En revanche, si le destinataire est consentant et semble excité par la perspective, « il s’agit probablement d’un scénario beaucoup moins dégradant ».

Mais évidemment, le porno est une mise en scène. « Une grande partie du problème de compréhension de l’intention réside dans le fait de ne pas savoir d’où provient le porno que vous regardez et de n’avoir aucune idée du bien-être des acteur·ices-performeur·ses », explique Lavinia. « C’est pourquoi je maintiens qu’il est préférable de payer pour son porno et de ne pas utiliser les sites gratuits. »

Pour en revenir aux cumshots, il y a d’autres raisons d’être sceptique quant à l’idée que tout éjaculat sur le visage, la poitrine ou la bouche est intrinsèquement dégradant pour les femmes. « Il ne faut pas oublier que ce type de final est également présent dans le porno LGBTQ+ », explique Lavinia. T6X87 se décrit comme « un homme gay qui regarde beaucoup de porno et qui fait aussi du porno » (T6X87 est son nom de scène). « Il y a des raisons pour lesquelles une personne pourrait préférer ne pas recevoir de sperme en elle, explique-t-il. La principale étant qu’il y a un risque plus élevé d’attraper une IST si les fluides sont échangés de cette manière. »

Si l’on regarde la pornographie des années 1980 et 1990, pendant la crise du sida, T6X87 souligne que « les acteurs avaient souvent l’air vraiment effrayés par le sperme – il était projeté sur leurs visages et leurs corps et ils gardaient la bouche fermée tout en essayant de ne pas en avoir dans les yeux ». Ça a évidemment beaucoup changé depuis, mais le fait qu’on puisse maintenant filmer des scènes de cumshot sans aucune crainte est encore « assez nouveau et excitant », explique-t-il. « Pour beaucoup d’entre nous, ça revient à célébrer le fait qu’on a atteint un point dans l’épidémie où celles et ceux qui ont la chance d’avoir accès à la PrEP, etc. peuvent désormais avoir des relations sexuelles sans stresser. »

En fin de compte, l’important n’est peut-être pas l’éjaculation elle-même, mais ce que l’on en fait. « Ce qui est misogyne à mon avis, c’est le fait d’être amusé de voir une personne couverte de sperme pour ensuite la qualifier de salope ou de pute parce qu’elle a reçu une décharge », affirme Lavinia, pointant du doigt le langage de « slut-shaming » utilisé dans les titres de référencement, les commentaires et les sites de vidéos en ligne. Finalement, la meilleure chose à faire est de prendre toutes les vidéos pornographiques avec un peu de recul.

« Ce sont les réals qui décident de ce que les gens voient à l’écran et il est important de se rappeler que le groupe qu’ils représentent est très petit par rapport à la taille des audiences, souligne T6X87. Certains peuvent avoir une sorte de vision artistique, mais la plupart du temps, ils font ce qu’ils pensent pouvoir vendre. » En résumé, la prochaine fois que vous matez un film porno, gardez en tête que l’élément le plus déterminant d’un money shot, eh bien c’est l’argent.

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La kétamine est en train de tuer le dancefloor

La majorité des clubs de cette planète ont été violemment touchés par la crise liée à l’augmentation générale du coût de la vie. Sortir en club est devenu un luxe. Mais il y a un autre truc qui menace sérieusement la nightlife : la kétamine, ou plus précisément une surabondance de cette substance. « Y’a beaucoup trop de kéta sur les dancefloors du Royaume-Uni », a fait remarquer Salute, un DJ de Manchester, dans un tweet qui a été liké près de 2 000 fois. « Juste, ça craint de voir les gens rester debout comme des zombies sans danser. »

Ce sentiment a suscité l’approbation d’un grand nombre de clubbers et DJs. En réponse à ce tweet, la DJ et productrice polonaise VTSS a écrit : « J’ai moi-même commencé à demander aux promoteur·ices des villes où je suis programmée quelle était la substance prédominante qui y était consommée, histoire d’ajuster mes attentes en matière de vibe. »

La kéta est-elle réellement en train de tuer le dancefloor, ou s’agit-il d’un discours un tantinet exagéré ? Selon Sam Binga, DJ basé à Bristol, cette drogue est bel et bien en train de ruiner l’ambiance, du moins dans une certaine mesure. « Un dancefloor chargé en K ne dégage aucune énergie, explique-t-il. La kétamine est plutôt une drogue qui isole. Et si en tant que DJ, tu te retrouves en face d’un public fervent de cette drogue bizarre et dissociative, tu vas avoir l’impression que ces gens sont moins impliqués dans ce qu’il se passe. »

Le DJ Josh Haygarth, connu sous le nom de Next Generation Noise, va dans le même sens. « La kétamine ralentit considérablement la cadence générale, déclare-t-il. Quand ton set est pensé pour monter en puissance et que la foule a l’air de participer à une sorte de mannequin challenge, c’est pas évident de faire grimper l’énergie. »

Si le public s’anesthésie par choix, est-ce que ça pourrait à terme influencer les sons qui passent en club ? Dans les années 2000, on a souvent attribué la popularité du wonky, un style dérivé du dubstep connu pour ses rythmes instables, à la prévalence de la kétamine. Ed Gillet, l’auteur de Party Lines, un livre qui retrace l’histoire de la dance music britannique, hésite cependant à surestimer l’influence d’une seule drogue sur la dance music. Il reconnaît toutefois qu’il existe des précédents historiques suggérant que la kétamine « a bien eu un effet sur le genre de sons qui sont apparus sur les dancefloors britanniques », soulignant par-là le lien entre la drogue et la techno minimale.

Il est logique que les DJs trouvent que les foules qui consomment principalement de la kéta ne sont pas aussi engagées avec leur set. La dissociation, l’un des effets secondaires les plus connus de la kétamine, désigne un état mental temporaire dans lequel une personne se détache de son environnement. « Quand les gens consomment de la kétamine à forte dose, ils peuvent traverser une expérience hallucinatoire intense », explique Adam Waugh de The Loop, une association spécialisée dans le test de drogues. « Mais d’un point de vue extérieur, ils ne réagissent pas du tout. »

Certaines personnes ont cependant rapporté qu’à des doses plus faibles, la K pourrait aider à profiter davantage de la musique et avoir de légers effets énergisants, note Waugh. Ses effets dissociatifs se trouvent toutefois aggravés quand on mélange cette drogue à l’alcool. Et surtout, cette drogue est souvent prise en trop grande quantité. « Les tolérances varient beaucoup d’une personne à l’autre, sans doute plus que pour d’autres drogues, explique-t-il. La dépendance à cette drogue et la façon dont elle affecte différemment le corps des consommateur·ices sont des paramètres qui ont probablement contribué aux risques qu’on lui connaît. »

Haygarth et Binga confirment avoir remarqué que le public était plus susceptible de consommer des quantités excessives de kétamine après le confinement. « D’après ce que j’ai pu observer du public, j’ai bien l’impression que c’est devenu la drogue de prédilection […] Toutes les personnes qui ont fêté leurs 18 ans pendant les différents confinements ont débarqué dans le milieu alors qu’on venait de rouvrir, et elles ont tout de suite sauté dans le grand bain, spécule Haygarth. Je pense que c’est la raison pour laquelle on constate une utilisation moins responsable de la kétamine, parce qu’en un rien de temps, leur parcours rave est passé de zéro à cent. »

Lors de l’un de ses premiers shows post-COVID à Bristol, Binga a vu des teufeur·ses trop chargé·es en K se faire sortir quasi inconscient·es hors de la salle, alors que la soirée commençait à peine. « Avec la kétamine, il semble très facile de passer du statut de “oh, je m’éclate” à celui d’épave qui s’effondre dans un coin, explique-t-il. Et pour nous, DJs, c’est vraiment pas cool. »

Waugh reconnaît que si la consommation de kétamine semble s’être accélérée après le confinement, c’est plus globalement la consommation de toutes les drogues qui a augmenté pendant le confinement. « Je dirais non seulement qu’on croise plus de kétamine qu’avant, mais qu’on voit aussi plus de gens qui consomment de la kétamine de manière problématique », déclare-t-il. Waugh ajoute que l’organisation The Loop a constaté une hausse du nombre de personnes se présentant avec des symptômes liés à la consommation de kétamine, comme des problèmes de vessie et des crampes.

Évidemment, la kétamine n’est pas une nouvelle drogue. Synthétisée pour la première fois en 1962 et approuvée par la FDA en 1970, elle a été administrée aux soldats américains pendant la guerre du Viêtnam afin de soulager la douleur. Et ce n’est pas la première fois que l’on constate une augmentation sensible de la présence de kétamine sur les dancefloors : Gillet explique que les perturbations majeures de l’approvisionnement en MDMA à la fin des années 2000 ont coïncidé avec la montée en puissance de la kétamine et d’autres drogues. « Il y a véritablement eu une augmentation de la quantité de kétamine consommée sur les dancefloors britanniques », déclare Gillet à propos de ces années-là.

Même avant les années 2000, la prévalence de la kétamine avait déjà un impact sur la vibe générale. Mark, propriétaire d’un grand club londonien, a plongé dans la scène des free parties, quand les raves non autorisées se sont répandues à travers l’Europe dans les années 1980 et 1990 (il parle sous couvert d’anonymat pour des raisons professionnelles). « Au début, tout le monde prenait de l’ecstasy, se souvient-il. Il y avait donc une expérience beaucoup plus communautaire ; c’était très bienveillant, on s’aimait, on s’amusait. »

Mark se remémore l’apparition de la kéta en soirée à la fin des années 1990. « Elle est arrivée en masse, tout le monde a voulu l’essayer… et j’ai eu l’impression que la kétamine a complètement tué la scène, presque du jour au lendemain, raconte-t-il. L’expérience collective, le sentiment d’unité, tout ça s’est en quelque sorte dissipé et a laissé place à des milliers de personnes traversant des expériences relativement introverties et introspectives. »

Gillet pense qu’il est trop simpliste de suggérer que seule la kétamine serait responsable de la disparition de cette scène des free parties. « La scène des free a été, dans une large mesure, stoppée de force par la législation qui les a interdites, explique-t-il. C’est trop facile de dire que tout le monde prenait de la MDMA et que tout allait bien, puis que tout aurait mal tourné avec l’arrivée de la kétamine. »

Si les personnes qui consomment trop de K niquent l’ambiance sur le dancefloor, c’est aussi en partie à cause d’un manque d’éducation. « Les gens sont [souvent] surpris d’apprendre qu’il est dangereux de mélanger la kétamine et l’alcool, explique Waugh. La kétamine et l’alcool sont des combinaisons de drogues assez courantes, mais qui présentent un risque d’overdose mortelle. » Dans une étude australienne réalisée en 2021, l’alcool était présent dans plus d’un quart des décès liés à la kétamine.

Bien entendu, il ne s’agit pas seulement d’un manque d’information, souligne Waugh, mais aussi d’autres facteurs qui poussent à la surconsommation de drogues, comme les problèmes de santé mentale. « Les jeunes traversent des moments difficiles actuellement, à cause de l’inflation et du coût élevé de la vie, explique-t-il. Nombreux sont les gens qui utilisent la kétamine comme moyen d’automédication. »

Éduquer les gens sur leur consommation de drogue, plutôt que de les criminaliser pour ça, pourrait contribuer à améliorer la vibe. « Il est possible de consommer de la kétamine de manière responsable mais on n’éduque pas, on ne prodigue pas de conseils sur la manière de le faire, déclare Haygarth. Les ravers découvrent leurs limites à leurs dépens et ignorent ce qui est considéré comme une dose excessive ou un usage dangereux, jusqu’à ce qu’il soit trop tard. »

Pour l’instant, les DJs avec lesquels VICE s’est entretenu sont catégoriques : ils resteront fidèles à ce qu’ils veulent jouer — public sous kétamine ou non.

Binga émet l’hypothèse selon laquelle un public en état de dissociation ne pourrait réagir que lors des « moments forts », comme les drops, mais le DJ n’ajuste pas consciemment ses sets en fonction des personnes sous kéta. « J’adapte mes sets selon les réactions du public face à ce que je propose, explique-t-il. Mais je n’essaie pas de deviner sous quelles substances ils sont. »

Haygarth va dans le même sens, précisant qu’il n’adaptera pas sa musique parce que le public est plus susceptible d’être sous kétamine. « La majorité des consommateur·ices de K sont en général à l’arrière de la salle, adossé·es au mur, explique-t-il. De là où je suis sur scène, cette partie du public n’est pas ma priorité. Je me concentre sur les gens qui sont venus pour la rave — ceux qui sont là pour l’énergie. »

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