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Les révoltés du billet : « Le sigle RATP, c’est pour Rentre avec tes pieds »

Un curieux programme de remise en forme par la marche intensive semble s’être mis en place à Paris. Pour encourager tous les Parisiens à effectuer leurs 10 000 pas par jour, l’objectif minimal pour garder la santé, il a suffi à la RATP de faire flamber le ticket de métro de 43 % pour les voyageurs occasionnels : l’achat de dix billets passe de 17,50 euros à 25 euros en 2025.

Avec des campagnes de communication pour le moins discrètes autour de la « révolution billettique 2025 – Simplicité pour tous », mais des contrôleurs en masse pour décocher des amendes de 50 euros, ce sont, tout à coup, des armées de Parisiens qui trouvent que, finalement, « on n’a qu’à y aller à pied ».

Valérie Pécresse, la présidente de la région Ile-de-France, a eu beau répéter qu’il s’agissait de « réparer une injustice », avec ce tarif unique métro-RER qui diminue le coût du billet pour ceux qui viennent d’au-delà du périph, les Parisiens, qui paient leur billet à l’unité 70 centimes de plus qu’en 2024, n’arrivent pas à s’en réjouir. On a beau leur expliquer que le prix pour la grande banlieue a baissé ou que ça reste moins cher qu’à Tokyo, Londres ou Copenhague, ils persistent à se référer avec ce qu’ils payaient au mois de décembre, plutôt que de se réjouir de ne pas habiter ailleurs.

Les bornes de vente de titres de transport offrent le spectacle de touristes qui n’y comprennent rien, épaulés par des Parisiens qui n’y comprennent rien non plus, mais ne le savent pas encore. La RATP assure qu’il s’agit d’une simplification « pour les voyageurs occasionnels, deux tickets à tarif unique », mais la formule annonce déjà une simplification compliquée. Et si la simplification consiste à éliminer le tarif dégressif pour les billets achetés par dix, est-ce qu’elle fait vraiment plaisir aux voyageurs ?
A quoi on les reconnaît

A la borne de vente de billets, ils constatent que les carnets ont disparu et qu’ils n’échapperont pas au passage du prix unique à 2,50 euros. Ils se sont crus malins en achetant des billets à l’avance en prévision des augmentations pendant les Jeux olympiques sans savoir qu’il y en aurait bientôt une autre. Ils ont découvert qu’ils ne pouvaient plus utiliser leur carte de transport chargée de billets de métro dans le bus et le tramway, au nom de la « simplification ». Ils ont croisé des gens de banlieue très contents de la nouvelle tarification et ont compris que les Parisiens n’étaient pas les seuls à prendre le métro.
Comment ils parlent

« Le sigle RATP, c’est pour Rentre avec tes pieds. » « Ils nous ont mis les tarifs de 2030 en 2025. » « Mais, au guichet, on m’a dit le contraire… » « A ce prix-là, j’espère qu’il y a des bonbons et des bouteilles d’eau entre chaque siège du métro. » « Dans l’expression “la révolution billettique est en marche”, le mot important c’est “marche” ? » « J’ai fait 17 500 pas hier. »
Leurs grandes vérités

Payer 5 euros pour aller bosser, c’est cher payé.
Leurs questions existentielles

Pourquoi, pour le tramway T12, il ne faut pas un billet de tramway mais un billet de métro ? Pourquoi les anciens billets ne peuvent cohabiter avec les nouveaux sur un passe Navigo Easy ? Pourquoi dois-je attendre quatre heures quand la carte se vide avant de pouvoir la recharger ? À partir de combien de stations de métro ferais-je mieux d’y aller à pied ?
Leurs Graal

Parler en langage RATP : « un billet ferré » ou « un billet surface » ou « un titre de transport ». S’imaginer qu’il vaut quand même mieux être voyageur qu’à la place de « Karl », le community manager de la RATP qui doit faire des posts en deux parties sur X pour expliquer la simplification des tarifs.
Les fautes de goût

S’entendre répondre « mais ça vous permet de circuler sur tout le réseau ferré », quand on se plaint de l’augmentation de 43 %, comme si on allait décider de prolonger son voyage de plusieurs stations pour amortir son billet. S’entendre répondre qu’à Lyon, pour ce prix-là, on n’a pas le même réseau, alors qu’on n’a pas prévu de déménager dans le Rhône. S’entendre répondre que ça reste moins cher qu’un plein d’essence, quand on n’a pas de voiture.
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L’auteur de l’attentat devant les anciens locaux de « Charlie Hebdo » condamné à 30 ans de réclusion criminelle

Une question vertigineuse a traversé ce procès jusqu’au verdict, prononcé jeudi 23 janvier. Celle de la dimension « culturelle » de cet attentat, commis en septembre 2020 par un migrant venu du Pakistan, où le blasphème est puni de la peine de mort.

C’est un procès bien singulier qui s’est achevé, jeudi 23 janvier, devant la cour d’assises spéciale de Paris. Celui d’un attentat terroriste d’un genre nouveau, visant à venger le Prophète en vertu du code pénal en vigueur dans un autre pays, le Pakistan. Le 25 septembre 2020, un migrant de 23 ans originaire de la province du Pendjab, Zaheer Mahmoud, avait tenté de tuer à coups de hachoir deux jeunes gens qui fumaient une cigarette devant les anciens locaux de Charlie Hebdo, rue Nicolas-Appert, à Paris, en réponse à la republication des caricatures de Mahomet par le journal satirique.
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« Je pensais que c’était la loi du Coran et du Pakistan », a expliqué l’accusé à la barre pour justifier son geste, assurant n’avoir pris conscience qu’en prison de l’absurdité et de l’horreur de son crime. A l’issue des débats, ce fils de paysans, venu en France dans l’espoir d’y trouver une vie meilleure, a été condamné à trente ans de réclusion criminelle pour tentatives d’assassinat terroriste, assortis d’une interdiction définitive du territoire.

Ses cinq coaccusés, de jeunes migrants sans éducation, venus comme lui de villages pendjabi et qui partageaient son indignation et son désir de vengeance, ont été condamnés à des peines comprises entre trois et douze ans de réclusion criminelle pour association de malfaiteurs terroriste. A l’exception de deux d’entre eux, mineurs au moment des faits, tous seront interdits du territoire à l’issue de leur détention.
Le blasphème, « névrose » pakistanaise

Une question, vertigineuse, a opposé la défense et l’accusation durant ces trois semaines d’audience : cette attaque terroriste, qui n’était pas d’inspiration djihadiste, revêtait-elle une dimension culturelle ? En d’autres termes, les codes de la société pakistanaise, dans laquelle les personnes accusées de blasphème sont régulièrement condamnées à mort quand elles ne sont pas lynchées par la foule, permettent-ils de comprendre les ressorts profonds du passage à l’acte de Zaheer Mahmoud et la complaisance de ses coaccusés ?
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Dans son réquisitoire, le ministère public a reconnu que ce dossier terroriste présentait une « spécificité » : il est le premier impliquant des migrants pakistanais se réclamant de l’islam sunnite Barelvi, un courant marqué par une très forte dévotion à l’endroit du Prophète. « Tous les accusés ont été éduqués dans l’idée que le blasphème est un crime passible de la peine de mort, mais nul n’a jamais été autorisé à se faire justice soi-même », avait néanmoins insisté le parquet afin de combattre l’idée que « le seul fait culturel pakistanais » serait à même d’expliquer ce passage à l’acte.

Dans une impressionnante plaidoirie, mercredi, un des avocats de Zaheer Mahmoud, Me Albéric de Gayardon, a tenu à replacer la dimension culturelle au cœur de ce dossier. Non pas pour exonérer son client de sa responsabilité, mais pour en « éclairer » la « singularité ». « C’est au Pakistan que s’est forgée la personnalité de mon client et que l’attentat trouve son origine véritable. Le Pakistan, et sa névrose nationale : le blasphème », a-t-il commencé.

« Dire cela, ce n’est pas céder à un déterminisme paresseux. Certes, seul, parmi ses compatriotes de la diaspora pakistanaise, Zaheer Mahmoud est passé à l’acte. Mais réduire la question du blasphème au Pakistan à un élément de décor procédural est une lourde erreur qui obscurcit tout, a-t-il poursuivi. Ici, le contexte, c’est plus que le contexte : c’est la matrice. »
Peine de mort et lynchages

Cette « dévotion toute particulière à l’endroit du Prophète », explique-t-il, trouve sa source dans le courant sunnite Barelvi, un mouvement fondé pendant la colonisation anglaise, aujourd’hui majoritaire au Pakistan. « Elle est un élément constitutif de l’identité nationale du Pakistan, qui signifie littéralement “le pays des purs”. L’idée selon laquelle le blasphème est puni de mort y est majoritaire. »

Quelques exemples récents d’exécutions extrajudiciaires illustrent selon lui le bain culturel dans lequel a grandi son client : un Sri Lankais accusé de blasphème « lynché par une centaine de personnes » avant d’être immolé par le feu dans la province du Pendjab en 2021 ; un homme « devenu un héros parce qu’il a assassiné un blasphémateur et qui pose tout sourire avec les policiers venus l’arrêter » en août 2020, fait divers que Zaheer Mahmoud avait d’ailleurs partagé avec ses coaccusés avant son attentat ; un médecin abattu par des policiers, en novembre 2024, avant que son corps ne soit « brûlé par une foule de fanatiques »…
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« Cet aspect populaire est dérangeant et bouscule nos certitudes, a-t-il enchaîné. Il y a une spécificité pakistanaise, et nous sommes déconcertés, car elle s’invite pour la première fois devant cette cour. Se priver de se plonger dans cette histoire de la relation du Pakistan avec le blasphème, c’est se priver de comprendre la haine antifrançaise qui a secoué ce pays, les manifestations monstres, sans comparaison dans le monde musulman, qui s’y sont déroulées après la publication des caricatures. C’est s’interdire de comprendre la rage qui a été déchaînée par de simples dessins dans ce pays… »
La « fabrique de la haine »

Au lendemain de la republication des caricatures par Charlie Hebdo, le 1er septembre 2020, le Pakistan avait été secoué par de violentes manifestations antifrançaises. Une mobilisation instrumentalisée par un parti politique, le Tehrik-e-Labbaik Pakistan, dirigé par un imam radical, Khadim Hussain Rizvi, dont Zaheer Mahmoud écoutait assidûment les prêches. « Cet attentat s’inscrit dans un déchaînement collectif et dans un contexte national », insiste l’avocat.

Cette poussée de fièvre avait, de fait, été encouragée au plus haut sommet de l’Etat. « Même le premier ministre du Pakistan a condamné ces caricatures de Charlie Hebdo ! », avait déclaré Zaheer Mahmoud en garde à vue, à un moment de la procédure où il ne comprenait pas pourquoi on le considérait comme un « terroriste ». « Le gouvernement pakistanais participe directement à la fabrique de la haine, il la respectabilise, poursuit l’avocat. C’est ce contexte qu’il ne faudra pas minimiser quand vous poserez la question du nombre de tabous que Zaheer Mahmoud a dû lever dans son esprit avant de tenter de donner la mort. »
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« L’effort de souplesse mentale que nous demande ce dossier est absolument énorme, conclut-il. Il nous demande de ne pas le juger comme d’autres dossiers terroristes dont les accusés sont des enfants de la République. Que sait Zaheer Mahmoud du pouvoir émancipateur de la satire ? Il n’en sait rien. Il est en France physiquement, mais, dans sa tête, il est toujours dans ce pays où les blasphémateurs sont au mieux arrêtés, quand ils ne sont pas lynchés. Zaheer Mahmoud n’a pas de points de désaccord avec la culture française autre que celui du blasphème. Mais, pour lui, il n’y a qu’un seul châtiment, celui qu’il a appris. Ce n’est pas un combattant, c’est un illuminé. »
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Divorce pour manquement au « devoir conjugal » : pourquoi la France a été condamnée par la CEDH

La cour a donné raison à une requérante, qui l’avait saisie en 2021. Des associations féministes saluent une « décision historique ».

C’est une étape importante dans la jurisprudence relative au « devoir conjugal » – un terme souvent invoqué en droit français bien qu’il ne figure pas dans le code civil. Dans un arrêt rendu jeudi 23 janvier, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) sanctionne la France pour son usage de cette notion et juge que le fait de refuser d’avoir des relations sexuelles avec son mari ne constitue pas une « violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage ».

La Cour donne ainsi raison à la requérante, une femme de 69 ans, qui l’avait saisie le 5 mars 2021. Mariée en 1984, cette dernière avait lancé une procédure de divorce en 2012, au terme de laquelle un divorce pour faute, à ses torts exclusifs, avait été prononcé, au motif qu’elle s’était soustraite au devoir conjugal. Par un arrêt du 7 novembre 2019, la cour d’appel de Versailles, soulignant « le refus continu opposé par l’épouse à partir de 2004 à des relations intimes avec son mari », considérait en effet que cela constituait « une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ».

Après avoir épuisé toutes les voies de recours en France, la dame s’était tournée vers la justice européenne, soutenue par des associations féministes comme le Collectif féministe contre le viol. Elle dénonçait la méconnaissance de son droit au respect de la vie privée, consacré par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Evoquant une « vision archaïque du mariage », la requérante soulignait que son refus des relations intimes s’inscrivait dans un contexte de violences de la part de son époux, et s’expliquait aussi par des problèmes de santé importants.
« Forme de violence sexuelle »

« La réaffirmation du devoir conjugal et le fait d’avoir prononcé le divorce pour faute au motif que la requérante avait cessé toute relation intime avec son époux constituent des ingérences dans son droit au respect de la vie privée, dans sa liberté sexuelle et dans son droit de disposer de son corps », tranche la décision, adoptée à l’unanimité des sept juges. La Cour reconnaît donc le « préjudice moral certain » de la requérante.
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Mais elle va plus loin, profitant de cette occasion pour rappeler à la France que « tout acte sexuel non consenti est constitutif d’une forme de violence sexuelle » – la formulation a une résonance particulière au moment où se pose la question d’introduire la notion de consentement dans la définition pénale du viol. Le « devoir conjugal » est « contraire à la liberté sexuelle et au droit de disposer de son corps », insiste la CEDH. « La Cour ne saurait admettre, comme le suggère le gouvernement, que le consentement au mariage emporte un consentement aux relations sexuelles futures. Une telle justification serait de nature à ôter au viol conjugal son caractère répréhensible », tance-t-elle. Or, ce dernier est admis par la Cour de cassation depuis 1984, et depuis une loi de 2006 le viol entre époux est une circonstance aggravante de l’infraction de viol.

Il s’agit d’une « décision historique », ont salué la Fondation des femmes et le Collectif féministe contre le viol dans un communiqué. « Désormais, le mariage n’est plus une servitude sexuelle. Cette décision est d’autant plus fondamentale que près d’un viol sur deux est commis par le conjoint ou le concubin. Les arrêts de la CEDH bénéficiant d’une “autorité de la chose interprétée”, la décision de ce jour va s’imposer aux juges français qui ne pourront plus considérer qu’une communauté de vie implique une communauté de lit », souligne l’une des avocates de la requérante, Delphine Zoughebi, citée dans ce communiqué.
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« C’est une avancée formidable, se réjouit auprès du Monde Emmanuelle Piet, présidente du Collectif féministe contre le viol. Cela vient reconnaître que quand on est marié, on n’est pas obligé d’avoir des relations sexuelles, les juges ne pourront donc plus invoquer le devoir conjugal », encore au cœur de certaines décisions de divorce rendues en première instance et en cour d’appel. Pour Mme Piet, cet arrêt plaide pour une « réécriture des articles 212 et 215 du code civil ». L’article 212 prévoit que « les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance », et l’article 215 que « les époux s’obligent mutuellement à une communauté de vie ». Interrogé sur cet arrêt en marge d’un déplacement à Agen, Gérald Darmanin, le ministre de la justice, a répondu : « Evidemment que nous irons dans le sens de l’histoire et que nous adapterons notre droit. »
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La première prison de haute sécurité pour narcotrafiquants en fonction le 31 juillet, annonce Gérald Darmanin

Les « 100 plus gros narcobandits » du pays, quel que soit leur statut de détention, seront transférés à partir de mars pour être « mis à l’isolement total » dans cet établissement « rénové ». Son emplacement n’a pas été précisé par le garde des Sceaux, qui a promis un lieu « inviolable », où il sera « absolument impossible de se faire livrer téléphone ou drogue ». Un budget de « 4 millions d’euros » a été débloqué pour la mise en place de cet établissement.
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« Derrière vos décisions, ce sont des gens qui vont mourir » : découvrez les extraits du livre-enquête « Les Juges et l’Assassin » sur la gestion du Covid-19

« Derrière vos décisions, ce sont des gens qui vont mourir » : découvrez les extraits du livre-enquête « Les Juges et l’Assassin » sur la gestion du Covid-19

Dans leur livre à paraître mercredi 22 janvier chez Flammarion, les journalistes du « Monde » Gérard Davet et Fabrice Lhomme reviennent, éléments inédits à l’appui, sur la façon dont l’exécutif a géré la crise engendrée en 2020 par l’épidémie. Nous en publions des extraits.

Par Gérard Davet et Fabrice Lhomme
Publié aujourd’hui à 06h00, modifié à 11h34

Temps de Lecture 19 min.

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[Le récit de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, auteurs de Les Juges et l’Assassin (Flammarion, 448 pages, 23 euros), s’appuie notamment sur une documentation très abondante, extraite en partie de la procédure judiciaire ouverte devant la Cour de justice de la République (CJR). Ainsi, les échanges mentionnés entre les différents protagonistes proviennent d’e-mails, de SMS ou de notes figurant au dossier des juges chargés de l’enquête.]
« Les Juges et l’assassin », de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, Flammarion, 448 pages, 23 euros.
« Les Juges et l’assassin », de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, Flammarion, 448 pages, 23 euros.

Le 22 janvier 2020, une patiente chinoise originaire de Wuhan est hospitalisée à l’hôpital Bichat, à Paris. Elle souffre d’une forte fièvre. Avenue de Ségur [le ministère de la santé], la température monte aussi. « C’est exponentiel, non ? », s’inquiète [Agnès] Buzyn [la ministre]. Fausse alerte : apparemment, la touriste venue de Chine souffre d’une autre affection. Ouf… Malgré tout, il est temps de déployer des dispositifs pour prendre la température des passagers dans les aéroports. « Il faut s’assurer que nous avons des détecteurs… pas gagné », s’irrite [Jérôme] Salomon [le directeur général de la santé]. « Je sais, on a raison scientifiquement, mais on aura tort politiquement », lui répond Buzyn. Un tel arsenal a été mis en place pour le virus Ebola, en 2014, mais dans le cas présent, l’amplitude est bien plus large (au moins trois vols directs hebdomadaires entre Wuhan et Paris), et surtout le matériel manque. « Peut-être prendre les devants et dire pourquoi on ne le fera jamais », préconise d’ailleurs Buzyn.

Quoi qu’il en soit, avenue de Ségur, on s’organise : Jérôme Salomon décrète le passage du Corruss, le fameux Centre de régulation et de réponse aux urgences sanitaires et sociales, en alerte de phase 2, dite renforcée.

Le 23 janvier, la ministre de la santé s’impatiente. Tout est trop lent, trop lourd. Il y a tellement d’instances, de structures, de textes et de personnes impliqués… « Bonjour Edouard [Philippe], écrit-elle au premier ministre. Puis-je te parler un instant de la gestion de crise du coronavirus ? J’ai besoin qu’on nous voie à l’œuvre sans attendre une décision de l’OMS et surtout que les douanes, la police, ne se mettent pas à porter des masques dans leur coin (…). Il faut une coordination. » Le même jour, l’OMS s’est résolue à ne pas lancer immédiatement le processus d’alerte internationale, ce que l’organisation appelle, dans son jargon, l’Usppi (urgence de santé publique de portée internationale). Dommage, cela aurait pu mobiliser les exécutifs de tous les pays. (…)
Un chiffre préoccupant

« Le 23 janvier, on est déjà en “Task Force Covid-19” et c’est la première fois qu’est faite, par l’Inserm, une analyse du risque d’importation en Europe », se souvient, de son côté, Jérôme Salomon. Qui reçoit le jour même une très mauvaise nouvelle.

Dans un courriel, Lionel de Moissy, le pharmacien responsable des stocks d’équipements de protection, lui communique un chiffre préoccupant : il ne reste plus que 65,9 millions de masques chirurgicaux à disposition, à la plateforme de Marolles, gérée par Santé publique France (SPF), dans le département de la Marne. C’est un chiffre dérisoire, il devrait y en avoir au moins dix fois plus… A une interlocutrice qui lui demande confirmation sur le passage en « alerte renforcée », la directrice Alerte et crise de SPF, Nicole Pelletier, répond par l’affirmative. Avec cette petite explication de texte : « Ça évite le mot “crise”, c’est plus soft… »

Surtout, ne pas affoler la population. (…)

Le 6 mars, une réunion « coronavirus » est organisée au plus haut niveau. Benoît Ribadeau-Dumas (BRD), directeur du cabinet d’Edouard Philippe, y tient ces propos, si l’on se réfère aux notes de Sibeth Ndiaye [porte-parole du gouvernement], qui consigne tout : « Masques : on n’en aura pas assez = il faudra proba dégrader notre doctrine d’utilisation des masques = priorité au personnel de santé. » Une phrase-clé. Difficile, à sa lecture, de ne pas en déduire, une nouvelle fois, que le gouvernement a adapté son discours sur les masques à la pénurie, ce dont l’exécutif s’est pourtant toujours défendu… Et qu’il a été contraint de procéder, en catastrophe, à des acquisitions coûteuses et, dans tous les cas, à la fois tardives et insuffisantes.

Voilà sans doute pourquoi, après une première circulaire rédigée le 9 mars, deux nouvelles notes du ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, les 19 mars et 1er avril 2020, interdisent aux policiers de porter des masques. Les autorités sanitaires mais aussi politiques avaient donc parfaitement conscience que les stocks étaient vides, mais il ne fallait pas affoler les Français, ni prêter le flanc à des accusations d’amateurisme. D’où les discours publics rassurants – et faux – qui vont se succéder…
Mot tabou

Le 23 avril 2020, Raymond Le Moign [directeur de cabinet d’Olivier Véran] prononce les mots qui font mal, dans un mail adressé à Ribadeau-Dumas. Ces écrits, eux aussi, confirment que la stratégie du gouvernement a bien été forgée sur l’absence d’équipements de protection : « La doctrine “masques” en vigueur actuellement a été établie dans un contexte de pénurie (…). Le besoin supplémentaire en masques chirurgicaux s’élevait à 230 millions par semaine. » Un peu plus loin, il le répète encore : « La doctrine “masques” mise en place début mars visait à répondre à la situation d’urgence sanitaire dans un contexte de pénurie. » Manifestement, le mot tabou ne l’était pas pour tout le monde. La pénurie était connue, mais au nom de la raison d’Etat il fallait la… masquer. (…)

[En février 2020, Agnès Buzyn quitte ses fonctions de ministre de la santé pour se présenter, sous l’étiquette macroniste, aux élections municipales à Paris prévues en mars.]

Dès le lendemain du débat télévisé, le 5 mars, l’un des hommes de confiance d’Emmanuel Macron, le préfet Jean-Marie Girier, adresse un message laudateur à la candidate de la majorité : « Vous avez crevé l’écran par votre posture apaisée et souriante. Le Président, qui vous a appelée avant le débat, était ravi de tous les messages positifs qu’il a reçus. » Buzyn se rengorge : « Je vais continuer, à fond, sur tous les fronts. » Même si le virus ne cesse de se rappeler à elle. Le même jour, elle encourage le premier ministre : « Je pense bien à toi car faire campagne en ce moment doit être difficile. J’ai compris que les sondages te sont favorables. Ouf. Ce n’est pas mon cas, mais il me reste dix jours. »

Elle veut y croire. Mais le soir même, alors que le nombre de cas de Covid explose, elle écrit à nouveau au chef du gouvernement, l’inflexion est brutale, la teneur de son message n’a plus rien à voir : « Le pire est à venir, je te l’ai toujours dit. Vous ne pourrez pas maintenir les élections (…). Nos hôpitaux vont déborder. »
Messages contradictoires

Toute l’ambivalence d’Agnès Buzyn est là, dans ces deux messages successifs. D’un côté, elle rêve de mener et surtout de gagner cette campagne municipale, de prouver à ce microcosme politique qui l’observe avec circonspection, voire condescendance, qu’elle est au niveau, et d’apporter au Président l’un des scalps dont il rêve, celui d’Anne Hidalgo. Et puis, maire de Paris… C’est bien plus prestigieux que beaucoup de postes de ministre. Et d’un autre côté, elle ne cesse de ruminer sa décision de quitter l’avenue de Ségur, redoute qu’on ne lui reproche d’avoir abandonné ses troupes au pire moment, s’en veut d’avoir cédé aux pressions de la galaxie macroniste, parvenue à lui faire croire qu’elle était la femme providentielle, ce dont elle doute de plus en plus…

D’où ces messages contradictoires, qui témoignent d’une forme de cyclothymie politique. Alors, pour sortir de ce dilemme insoluble, elle décide d’endosser un curieux rôle, celui de ministre bis de la santé. Ainsi, le 6 mars, de nouveau, elle presse Macron d’agir : « Ce petit mot pour vous dire de ne pas tarder à passer en phase 3, et à ralentir l’activité. C’est le prix à payer pour ralentir la diffusion du virus, qui est déjà partout. Même si le premier tour des élections peut se faire (ce dont je doute fort depuis toujours)… Mon avis est de prendre des décisions fortes et rapides. Les chiffres italiens sont très inquiétants et rapides. »

La mise en garde est pertinente. Mais inutile.

Car le lendemain, le président de la République annonce qu’il « n’y a aucune raison, mis à part pour les populations fragilisées, de modifier nos habitudes de sortie ». L’ex-ministre de la santé, une nouvelle fois, n’a pas été entendue.
Câlinothérapie au sommet de l’Etat

Les infections s’accumulent, 5 423 personnes sont diagnostiquées positives au virus en France – en l’absence de tests, ce chiffre est peu probant – et l’on dénombre déjà 127 décès. Si la situation sanitaire ne cesse de se détériorer, la trajectoire politique d’Agnès Buzyn n’est guère plus encourageante. Au soir du premier tour, dimanche 15 mars, elle dépasse à peine les 17 % de votes en sa faveur. 17,26 % plus précisément. A grande distance d’Anne Hidalgo (29,3 %) et de Rachida Dati (22,7 %). C’est une gifle, une de plus pour la majorité. (…)

Sans même attendre les consignes du parti présidentiel, Agnès Buzyn annonce l’arrêt de sa campagne. Consciente du fait qu’elle n’aurait jamais dû l’entamer. Les mesures de fermeture des crèches, écoles ou universités décrétées par Macron le 12 mars ? Partielles et bien trop tardives. C’est vrai, elle s’est battue, avec ses moyens, pour alerter sur les dangers du virus, influer sur le cours des choses. Sans succès. Elle enfonce le clou, le soir même, dans un SMS envoyé à Edouard Philippe : « Je sais que vous êtes en réunion pour le deuxième tour. Tout cela est déconnant. Ne nous fais pas faire une tambouille de second tour quand la situation est si grave. Nous avons déjà été assez ridicules comme cela. Je sais que mon avis t’importe peu depuis des semaines… » Elle est désemparée, manifestement. Amère de ne pas être plus écoutée. Mais aussi vexée d’avoir été aussi sèchement battue. D’ailleurs, l’annulation pure et simple du scrutin aurait aussi une vertu très personnelle : elle effacerait sa défaite…

Ecartelée entre l’avenue de Ségur et l’Hôtel de Ville, Agnès Buzyn a finalement perdu sur les deux tableaux. (…)

La défaite d’Agnès Buzyn consommée, l’heure est à la câlinothérapie, au sommet de l’Etat.

« Ton avis importe. Et a toujours compté pour moi », lui écrit Edouard Philippe, en réponse à son coup de blues. « Haut les cœurs », termine-t-il. Une formule passe-partout dont le premier ministre abreuve régulièrement ses proches. « Je suis tellement triste que tu ne m’aies pas entendue pour repousser ces élections, que j’ai vécues comme une mascarade. Cette campagne a été une souffrance pour moi tant je n’aurais pas pris les mêmes décisions que vous et tant j’ai senti le danger, toutes ces semaines », réplique Buzyn, tard dans la soirée, juste après l’élection. (…)
Etonnante déconnexion

En pleine schizophrénie, Agnès Buzyn dézingue tous azimuts dans ses nombreux messages. Comme désinhibée, elle vitupère contre le Conseil scientifique, et tout particulièrement son président, Jean-François Delfraissy, ou l’entourage du président de la République. Y compris lorsqu’elle s’adresse à Edouard Philippe : « Le conseiller du PR [président de la République] et son Conseil scientifique sont de la daube, tacle-t-elle. C’est à pleurer de voir qui vous conseille. Et moi aujourd’hui je n’ai plus de boulot et dans un mois peut-être morte. » (…). Elle prévient : « Je ne perds pas mes nerfs, je suis lucide, derrière vos décisions, ce sont des gens qui vont mourir (…). Le discours du PR de ce soir est incohérent. Faites de la politique et prenez vos responsabilités. »

« Derrière vos décisions, des gens vont mourir » : ce n’est plus un reproche, mais une accusation.

Ces messages, évidemment, nourrissent le dossier judiciaire. Qui, mieux qu’Agnès Buzyn, peut mettre en exergue le retard à l’allumage de l’exécutif ? Ces SMS éclairent l’étonnante déconnexion du couple Macron-Philippe, du moins si l’on se réfère à l’anxiété de leur ex-ministre de la santé, qui ne cesse d’alerter, voire de harceler, l’Elysée et Matignon sur l’imminence du péril. Elle pressent la catastrophe, se mord les doigts d’avoir abandonné l’avenue de Ségur… Dans un échange avec l’ancien directeur de son cabinet au ministère, le haut fonctionnaire Raymond Le Moign, resté à son poste, celui-ci lui fait part de son dépit : « On essaye de tenir au prix de grandes tensions internes entre Elysée et Matignon. C’est le prix à payer de ce type de circonstances. » (…)

Le 17 mars, le confinement total est décrété par le président de la République. Le second tour des municipales ne pourra évidemment pas se tenir à la date prévue, soit le dimanche 22 mars – il aura finalement lieu le 28 juin. Comme quoi, quand on veut reporter une élection, on y parvient, et ce n’est pas forcément une anomalie démocratique. De quoi sérieusement ébranler l’argument brandi par l’exécutif… (…)
« On s’est trompés deux fois »

[Les auteurs consacrent un long passage au témoignage, devant les magistrats, de Benoît Ribadeau-Dumas, alias « BRD », le directeur du cabinet d’Edouard Philippe.]

Dans le bureau des juges, BRD s’emploie avec habileté à désamorcer chaque bombinette susceptible d’exploser à la figure d’« Edouard ». Il sait bien les reproches qui sont faits à l’ancien premier ministre, comme à tous les responsables aux commandes de l’Etat : avoir déclenché trop tard la CIC [cellule interministérielle de crise], laissé se déliter les stocks de protections, puis dissimulé la pénurie, argumenté qu’il ne servait à rien de porter un masque pour se prémunir du virus… « Tous les scientifiques disent jusqu’à avril 2020 que les masques ne servent à rien en population générale, maintient-il. Quand ils changent d’avis, nous les suivons. » (…)

En tout cas, face aux magistrats, BRD ne s’embarrasse pas, contrairement à d’autres, de phrases à rallonge, ni ne se perd en tergiversations. Et surtout, il admet des erreurs : une anomalie au sein de l’exécutif ! « Bien sûr qu’on s’est trompés, les scientifiques se sont trompés », avoue-t-il franchement. Poursuivant son autocritique, avec une humilité à même de désarçonner les juges, qui n’y sont franchement pas habitués dans ce dossier, il dit encore : « On peut considérer qu’on s’est trompés deux fois. D’abord dans la préparation, parce que la décision de laisser tomber le stock de masques de 1 milliard à 100 millions peut aujourd’hui être analysée comme une erreur. Ensuite, on s’est trompés en répétant pendant deux mois qu’il ne fallait pas mettre de masques en population générale. Mais on l’a dit parce que les scientifiques nous le disaient, et parce qu’il fallait protéger l’accès des masques aux soignants. »

Les responsables de l’exécutif auraient donc failli, mais de bonne foi, à l’insu de leur plein gré en quelque sorte. En janvier 2020, assure BRD, « à Matignon, on ignore totalement à cette date cette histoire d’1 milliard de masques ». Et il insiste, avec une sincérité décidément rafraîchissante : « La logistique était déficiente, la chaîne de communication, les outils de traçabilité des décisions… Si vous voulez me faire dire que la communication n’était pas parfaite, elle ne l’était pas. »
Atermoiements des uns et des autres

Quant au premier tour des élections municipales, il reste en revanche convaincu qu’il fallait le maintenir. « Pour interrompre un processus démocratique à trois jours d’une élection, il fallait un consensus politique et un consensus scientifique », explique-t-il. Il le rappelle, toutes les forces vives – pour une fois en Macronie – ont été consultées, partis politiques, associations d’élus… « Tous se sont opposés, y compris violemment, à l’idée d’un report », souligne Ribadeau-Dumas. « Il n’y avait pas plus de risque à aller voter que d’aller dans des commerces », affirme-t-il par ailleurs, en citant l’avis du Conseil scientifique. Bref, à l’en croire, sur ce sujet, « la ligne adoptée était la bonne ».

Et puis, il y a l’organisation en général, et donc ce reproche fait à Edouard Philippe d’avoir tardé à déclencher la cellule interministérielle de crise [CIC]. Ribadeau-Dumas a consacré ses nuits et ses journées à lutter contre un triple virus : le Covid, l’administration et la réunionite. Avant le 17 mars, il se rend ainsi tous les jours à 16 heures au ministère de la santé pour présider une réunion dite « de haut niveau ». Puis, une fois la CIC activée, les réunions se multiplient encore, et il s’occupe toujours de celle de 16 heures, mais elle a lieu à Beauvau désormais… Maintes fois, il contient son exaspération devant les difficultés logistiques, l’enlacement des structures, les atermoiements des uns et des autres… En temps de guerre, pense-t-il, il faut prioriser, éviter les débats stériles. (…)

Avec le recul, aujourd’hui, il essaie d’oublier les déceptions. Les juges ont eu la cruauté de lui lire les notes de Buzyn, saisies dans l’ordinateur personnel de l’ex-ministre. Elle indique ceci, à propos de BRD : « Remarquablement intelligent, et sans aucun état d’âme. Un objectif : tout est fait et sera fait pour protéger le premier ministre. Pour cet objectif, il est prêt à n’importe quel mensonge. Ligne directe avec Le Canard enchaîné le lundi soir pour dézinguer tout ce qui bouge et qui pourrait éclabousser le PM [premier ministre]. On peut lui reconnaître une efficacité sans pareille au sein du gouvernement. Il semble que ce soit lui qui ait la main sur la gestion de crise après mon départ du ministère. » (…)
Les relations se dégradent

Benoît Ribadeau-Dumas prend un peu de temps pour répondre. « Cela m’attriste », lâche-t-il finalement aux juges. Avant de développer sa pensée : « C’est totalement faux. Je ne crois pas être un homme de mensonge. J’avais de la considération et de l’estime pour elle (…). Je ne pensais pas qu’elle s’abaisserait en plus à écrire des choses pareilles… »

Il est vrai qu’en pleine crise, à mesure que les corps se fatiguent, que la tension croît, tout prend une importance considérable, les nerfs sont à vif… Les relations se dégradent.

Ainsi, entre Benoît Ribadeau-Dumas et Jérôme Salomon, il y a parfois eu de l’eau dans le gaz. Plusieurs échanges de mails assez musclés en témoignent ; le directeur général de la santé se fait clairement remonter les bretelles. « A un moment, se souvient Ribadeau-Dumas, j’ai senti que Jérôme commençait à avoir peur du risque pénal, comme beaucoup, et mettait dans ses mails des formulations destinées à potentiellement se justifier un jour devant le juge pénal, et je lui ai fait remarquer. »

[Les auteurs évoquent longuement les obstacles auxquels se sont heurtés les magistrats.]

S’agissant des nombreuses auditions à venir, les magistrats vont, pour la plupart, s’en charger eux-mêmes ; le sujet est si complexe, sensible et technique que les gendarmes, même aidés ponctuellement par les policiers, malgré leur bonne volonté, ne pourront tout assumer. La répartition des rôles est actée, et Bruno Lavielle, le plus enquêteur des trois, se voit notamment assigner la tâche redoutable d’aller débusquer les rapports officiels enfouis dans les bureaux ministériels. Car leur mission est claire : établir si les responsables ont ignoré les alertes diverses et contribué à démanteler l’appareil sanitaire français. Les obstacles ne vont pas manquer.
Nombreuses embûches

Le pouvoir va se défendre, avec ses armes – nombreuses et puissantes. Quant à leur hiérarchie, leurs collègues même, ils ne vont pas tous être au soutien.

A tel point que le 18 octobre 2022, Janine Drai, Catherine Schneider et Bruno Lavielle adressent au président de la Cour de cassation un courrier au ton à la fois solennel et courroucé.

Dans leur lettre – confidentielle – au chef de la juridiction suprême, Christophe Soulard, qui est aussi leur supérieur hiérarchique – les juges nommés à la commission d’instruction de la CJR sont conseillers à la Cour de cassation –, ils soulignent leur « isolement progressif » depuis qu’ils ont été saisis, le 7 juillet 2020, de ce dossier hypersensible.

(…) Enfin et surtout, les magistrats relèvent que leurs investigations se heurtent à l’obstruction du pouvoir, dénonçant notamment « une certaine opposition à la communication spontanée de pièces ». Ils concluent que l’information judiciaire sur le Covid qu’ils conduisent « se révèle particulièrement difficile », du fait des nombreuses embûches mises sur leur chemin.
« La stratégie de l’évier »

La missive des trois juges d’instruction est révélatrice du climat de tension extrême dans lequel, durant près de cinq ans, s’est déroulée cette enquête restée à la fois secrète et sous haute surveillance du pouvoir politique qu’elle menace.

Ils ne devraient pas, selon nos informations, rendre leur ordonnance finale avant le printemps 2025. Une fois cette enquête de cinq ans close, sûrement la plus passionnante de leur vie de magistrats, il sera temps, pour Schneider et Lavielle, de faire valoir, à leur tour, leur droit à la retraite. Quelle que soit in fine sa traduction pénale, leur enquête tentaculaire pourrait faire date ; ils ont mobilisé tellement de moyens, mené tant d’interrogatoires, réuni une telle masse de documents… Sans jamais dévier de leur objectif ultime.

Leur méthode, bien connue, ces trois juges l’appellent « la stratégie de l’évier ». Imaginez un lavabo empli, après la vaisselle rituelle, d’un épais liquide bien trouble qui s’écoule d’abord lentement, très lentement, dans les canalisations ; à la fin, dans l’évier, il ne reste en général plus que le solide, le consistant. Ce qui tient devant un tribunal.

(…)

Frappé du sceau de l’Elysée, le document est tamponné de la mention « confidentiel ».

Le pouvoir avait visiblement l’intention de garder secrète cette note de cinq pages, rédigée le 1er décembre 2020 à l’attention du chef de l’Etat. Elle porte la signature d’Hélène Davo, alors conseillère justice d’Emmanuel Macron.
Multiplication des consultations juridiques

Si la révélation de cette note pourrait être embarrassante pour le locataire de l’Elysée, sa lecture est en tout cas passionnante puisqu’elle dévoile la stratégie élaborée, dans la plus grande discrétion, par la présidence de la République pour faire face à la menace judiciaire – et surtout la neutraliser. Nous sommes ici au cœur du réacteur étatique.

L’objet de la note, adressée au chef de l’Etat en personne, est clair : « Position à adopter face aux demandes et convocations de la Cour de justice de la République/Covid-19 concernant les membres de votre cabinet. » A cette date, à défaut de pouvoir entendre le chef de l’Etat lui-même, protégé par l’immunité attachée à sa fonction, les juges ont commencé à convoquer plusieurs de ses collaborateurs, dont ses deux conseillères santé, attendues au 21, rue de Constantine, dans les locaux de la CJR, les 9 et 10 décembre 2020. Sans compter les demandes de documents formulées auprès d’Alexis Kohler [le secrétaire général de l’Elysée]…

« Il est donc urgent de fixer une ligne de conduite », s’alarme Hélène Davo. La CJR, s’interroge-t-elle, « peut-elle demander à votre secrétaire général des détails de réunions, des pièces ? Des membres de votre cabinet peuvent-ils être entendus comme témoins ? ». En clair, ces initiatives judiciaires ne violent-elles pas l’article 67 de la Constitution aux termes duquel « le président de la République n’est pas responsable des actes accomplis en cette qualité (…), il ne peut durant ce mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis de témoigner, non plus que faire l’objet d’une action, d’un acte d’information, d’instruction ou de poursuite » ?

Preuve que la présidence juge l’affaire sérieuse, la magistrate en détachement à l’Elysée a multiplié les consultations juridiques – les fameux documents saisis place Vendôme –, dont la note du 1er décembre 2020 synthétise les conclusions. « Nous disposons à ce stade de trois positions différentes, résume Hélène Davo. Celle exprimée par Christian Vigouroux et Denys de Béchillon d’une part, la Chancellerie d’autre part, et enfin le SGG (secrétariat général du gouvernement). » La conseillère de l’Elysée indique d’emblée : « Ces analyses se tiennent toutes en droit ; l’arbitrage est donc éminemment politique. » Si étonnant que cela puisse paraître, il revient donc au président de la République de décider si l’Etat va ou non aider les juges dans leur enquête visant plusieurs de ses ministres. La France est décidément la plus monarchique des républiques. (…)

Avant de livrer ses propres recommandations, la conseillère justice se permet une pique à destination des juges. « Les magistrats de la CJR, expose-t-elle, ne comprennent manifestement pas à ce stade le processus décisionnel qui a entouré la gestion de la crise du Covid (le fait qu’ils n’aient pas fait de perquisition à Matignon alors qu’il n’y a pas d’immunité montre qu’ils n’ont pas compris encore où se situait une partie du centre de gravité). » Elle aborde surtout un aspect purement politique. « Votre position, assure-t-elle à Macron, sera interprétée et analysée à l’aune des débats suivants : volonté ou non de contribuer à la manifestation de la vérité, volonté de transparence ou non, et “déclaration de guerre aux juges”. Ce dernier débat sous l’angle “bras de fer avec la justice” pourrait susciter des polémiques dans le contexte actuel sensible au niveau régalien (cf. tensions récentes entre les juges et le garde des sceaux et “violences policières”). »
Un terrain glissant

La magistrate nourrit un autre sujet d’inquiétude, qu’elle partage avec le chef de l’Etat. « Il faut avoir en tête – et cela n’est pas neutre – que la juridiction pénale dispose de moyens coercitifs qu’elle a déjà utilisés dans cette affaire », écrit-elle, surlignant cette phrase en gras.

Elle évoque ainsi les « perquisitions nombreuses, notamment dans les domiciles privés, réalisées au lendemain de votre prise de parole et en pleine crise sanitaire ». « Il n’est pas impossible d’ailleurs que des écoutes téléphoniques soient actuellement en cours ou à venir », ajoute-t-elle. Là encore, ce n’est pas formulé explicitement, mais le message est limpide : chacun – y compris le chef de l’Etat – est prié d’être prudent au téléphone… La crainte se révélera infondée, les magistrats n’ayant ordonné, selon nos informations, aucune écoute téléphonique dans cette affaire.

Egalement surlignée en gras, il y a encore cette phrase, en forme de mise en garde : « En cas de non-déferrement des conseillers, un mandat d’amener peut être délivré par la CJR à leur encontre. »

De plus en plus politique, la collaboratrice du Président se risque alors sur un terrain glissant. « Tout au long de cette affaire, croit-elle bon de préconiser, il est indispensable que tous les acteurs appartenant à la majorité interrogés ou susceptibles de l’être par la CJR soient alignés : président de l’Assemblée nationale, Matignon, ministres et Elysée. »

Si l’on comprend bien, avant de répondre à la justice, il serait opportun que les figures de la majorité se soient mises d’accord sur une version identique, ou au minimum adoptent une position commune par rapport à la CJR en général. Plutôt choquant s’agissant de témoins priés – comme tout justiciable – avant leur audition de « prêter serment de dire toute la vérité, rien que la vérité ». (…)
« Se protéger du risque pénal »

Au cours de ses auditions, Edouard Philippe ne s’embarrasse pas d’empathie. Les plaintes de citoyens qui le conduisent devant la CJR ? « Je ne suis pas là pour faire de la psychologie, dit-il froidement, mais quand on perd un être cher, on en veut souvent à beaucoup de gens. » Le décor est planté, l’ancien chef du gouvernement n’est pas là pour compatir. Mais s’expliquer. Et surtout, se défendre. « Je conteste assez formellement l’idée que l’on puisse évoquer l’impréparation », assure-t-il par exemple. « Je suis parfaitement conscient de ne pas avoir tout réussi (…). Gérer une crise de cette ampleur n’est pas chose aisée. Toute décision peut être critiquée ou contestée. C’est par nature le lot de la décision politique », ajoute-t-il encore.

Les juges se montrent alors offensifs, jusqu’à se permettre de poser une « question simpliste », comme ils le disent eux-mêmes. L’ancien chef du gouvernement estime-t-il que « des Français ont pu être contaminés, et pour certains tués, à cause des choix de l’exécutif ? ». Philippe tente de conserver son calme. A la lecture de son procès-verbal d’interrogatoire, on peut se le figurer, concentré, le regard acéré. « Je ne sais pas répondre à votre question, et je ne comprends pas que vous me posiez cette question », rétorque-t-il finalement.

Parfois, la nature caustique du patron d’Horizons ressurgit. « J’ai eu à gérer deux épidémies, qui ne m’ont pas fait rire du tout : celle du Covid-19 et celle de l’ouverture de parapluies destinés à se protéger du risque pénal », dit-il ainsi drôlement. Sous la raillerie perce l’amertume. « Et quand un nombre significatif de personnes, qui doivent prendre des décisions, renvoient à d’autres, aux supérieurs hiérarchiques, le soin de les prendre, vous embolisez très vite un système. Vous ne verrez jamais ces ouvreurs de parapluie apparaître dans votre dossier », grince-t-il.
« Les Juges et l’Assassin », de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, Flammarion, 448 pages, 23 euros.

Rectificatif le 21 janvier 2025 à 11 h 18 : correction de la fonction attribuée à M. Raymond Le Moign
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Baraye... — Wikipédia

«Baraye... (en persan ...برای, signifie « pour » ou « à cause de ») est un vidéo-clip réalisé par Ashkan Rahimi et une chanson composée et interprétée par l'artiste iranien Shervine Hajipour au début des manifestations qui ont suivi la mort de Mahsa Amini.»

via https://www.youtube.com/watch?v=n0CQPKMyauw (thinkerview)
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Fatiguant les rust-fanboys

Le "Rust" pour les développeurs, c'est un peu comme l'"IA" pour les marketeurs, c'est fait genre que c'est plus sérieux, mais cela n’empêche en rien de coder avec les pieds, comme avec tout type de langage. Donc arrêter de mettre en avant que vous avez réécrit votre projet en rust ou qu'il est écris en rust, on s'en branle, car cela ne veut pas dire qu'il est mieux ou qui est meilleur sur la programmation et sur tous le reste. (surtout qu'avec le rust, par essence c'est le compilo qui est meilleur programmeur que vous)
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MON AVIS Hiver à Sokcho ★★★☆

Affiche

Soo-ha est une jeune métisse franco-coréenne, élevée seule par sa mère à Sokcho, un petit port sur la côte orientale de la Corée du sud. Après avoir bouclé des études de lettres, elle épaule le patron, veuf depuis peu, d’une modeste pension de famille. C’est là que débarque Yann Kerrand (Roschdy Zem), un dessinateur français en panne d’inspiration. À la demande du patron, Soo-ha va lui servir de guide.

J’ai eu un coup de cœur pour cette adaptation d’un livre publié en 2016 par une jeune écrivaine franco-suisse d’origine coréenne, Elisa Shua Dusapin. J’ai lu plusieurs critiques lui reprochant d’être lent et ennuyeux. Je comprends ce reproche. Mais je suis loin de le reprendre à mon compte.

Certes Hiver à Sokcho n’est pas un thriller à rebondissements. Il se déroule dans l’atmosphère, ouatée de neige, d’une petite ville littorale volontairement ennuyeuse. Il met en scène deux héros que rien ne prédisposait à se rencontrer. Yann Kerrand, un bédéiste normand interprété sans souci de vraisemblance par Roschdy Zem (mais Roschdy Zem est tellement charismatique qu’il lui sera beaucoup pardonné) n’a qu’une seule idée en tête : explorer un lien qui puisse inspirer sa prochaine BD.

Soo-ha (la stupéfiante Bella Kim, parfaite d’ambiguïté) est plus complexe. À vingt-trois ans, elle se sent perdue. Elle vient de terminer ses études mais n’a pas idée de la carrière qu’elle souhaite embrasser. Elle sort avec un garçon que sa mère rêve de lui voir épouser ; mais elle n’est pas sûre de ses sentiments. Reste une blessure jamais cicatrisée : celle de n’avoir jamais connu son père, rentré en France avant sa naissance.
La rencontre de Yann Kerrand va peut-être lui permettre de résorber ce trauma. Ses relations avec cet homme d’âge mûr sont complexes. Au départ, elle l’esquive et renâcle à assumer le rôle d’interprète et de guide que le patron de la pension de famille qui l’emploie lui assigne, par crainte d’être renvoyée une fois encore à son statut de métisse. Ensuite, elle ressent de l’attirance pour cet homme séduisant avec lequel, inconsciemment, elle s’imagine revivre la relation que sa mère a vécue avec son père. Enfin et surtout, elle voit en lui un père de substitution.

Hiver à Sokcho aurait pu se contenter de traiter cette relation-là. Mais, sans charger la barque, il lui adjoint des sous-thèmes. J’en ai identifié deux. Le premier est la cuisine. Elle est omniprésente. La mère de Soo-ha vend du poisson sur le port. Elle sait cuisiner le fugu, ce poisson qui, s’il est mal préparé, peut déclencher une intoxication mortelle. Les deux femmes vivent ensemble et sont filmées la plupart du temps en train de préparer leurs repas puis de les consommer. La relation entre Soo-ha et Yann Kerrand peut au contraire se lire comme la tentative avortée de se nouer par la nourriture : le Français refuse de prendre ses dîners à la pension de famille et boude les plats, français ou coréens, que lui mitonne la jeune femme.
L’autre sous-thème est celui du corps et de sa transformation par la chirurgie esthétique. Une cliente de la pension au visage recouvert de bandelettes se rétablit d’une opération. La mère de Soo-ha ne cesse d’encourager sa fille à corriger sa myopie pour se débarrasser des lunettes qui mangent son visage. Son petit copain lui suggère de se faire affiner le menton. J’ignorais que la Corée du Sud était « la capitale mondiale de la chirurgie plastique » – j’en pensais à tort l’usage plus répandu en Amérique latine, au Venezuela ou au Brésil par exemple.

J’ai été profondément ému par ce film pudique, par ses deux personnages solitaires, par les sentiments qui les animent et qu’ils peinent à exprimer, par le lien fragile qui se forme entre eux jusqu’à la manière si délicate dont il se dénoue.

Bande annonce ==> https://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=20612989&cfilm=304409.html
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Mediapart Du Dimanche 12 Janvier 2025

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Au volant d’une voiture sans permis....

D'accord avec le raisonnement mais ça "Moi j'ai 46 ans, 28 ans de permis, jamais un accident."

==> Cet argument d'autorité tout perrave là, garde-le pour toi stp.... Des accidents peuvent être causés par des chauffards même si tu maitrises ton véhicule, t'es pas à l'abri qu'on vienne te tamponner sans que tu t'y attendes....

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MON AVIS Ernest Cole, photographe ★★☆☆

!https://www.world-lolo.com/images/uploads/image.num1736596311.of.world-lolo.com.jpg

Issu d’une famille sud-africaine modeste, Ernest Cole (1940-1990) a documenté l’apartheid en Afrique du Sud avant de s’exiler aux Etats-Unis. C’est à New York que ce photographe naturaliste, héritier de Cartier-Bresson, publie en 1967 son unique album, parfois considéré comme l’un des plus marquants du XXe siècle : House of Bondage.

Ses héritiers ont demandé à Raoul Peck de lui consacrer un film, après avoir vu comment ce documentariste haïtien – qui fut l’éphémère ministre de la Culture de son pays en 1996/7 avant de prendre le chemin de l’exil – avait dans I Am Not Your Negro sublimé l’œuvre de James Baldwin. Ils lui ont offert en prime un bonus et une énigme : 60.000 négatifs laissés en dépôt dans une banque suédoise et découverts un quart de siècle après sa mort sans qu’on sache comment ils étaient arrivés là.

Raoul Peck ne force pas son talent pour raconter la vie en deux chapitres de ce photographe injustement méconnu. Le premier se déroule dans l’Afrique du Sud de l’apartheid ; le second dans l’Amérique de la ségrégation et du combat des Afro-Américains pour la reconnaissance de leur dignité. On y voit des photos d’Ernest Cole, parmi lesquelles beaucoup d’inédites retrouvées à Stockholm. On y entend la voix off de Raoul Peck s’exprimant à la première personne en lieu et place d’Ernest Cole sans qu’on sache s’il s’agit d’extraits des carnets du photographe ou de réflexions que le documentariste lui prête.

À vingt-six ans à peine, Ernest Cole a fui l’Afrique du Sud. Il n’y est jamais revenu, sa nationalité lui ayant été retirée et ses demandes de visa rejetées. Loin de l’Eldorado qu’il avait fantasmé, les États-Unis des années 60 l’ont profondément déçu. Comme il le résume d’une phrase : « En Afrique du Sud, à cause de la couleur de ma peau, je craignais de me faire arrêter ; dans le Sud des États-Unis, je craignais de me faire tuer » Après avoir tant bien que mal vécu de son art pendant une quinzaine d’années, Ernest Cole s’est lentement enfoncé dans la misère et a fini sa vie SDF.

En prime de cette histoire en deux parties, Raoul Peck a hérité d’une postface : 60.000 négatifs mystérieusement retrouvés en Suède – où on apprendra qu’Ernest Cole a fait quelques séjours dans les années 70. On pense à Vivian Maier et à la célébrité posthume que la découverte de ses photos lui a valu. Mais hélas, cette histoire fait long feu : à ce jour, les circonstances du dépôt de ces négatifs et de leur conservation demeurent inconnues.

Bande annonce => https://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=20611104&cfilm=316222.html
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