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Donald Trump se rêve en « crypto président » | Mediapart

Lors de la conférence annuelle du bitcoin à Nashville, Donald Trump a été ovationné alors qu’il a multiplié les promesses pour la communauté des fans de crypto-actifs. Une évolution qui renforce la convergence entre ce milieu et l’extrême droite.

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après la récente hausse du bitcoin, les milieux cryptos ont beaucoup d’argent à investir pour soutenir un candidat qui, en retour, réaliserait leurs rêves de dérégulation et de légitimation du bitcoin. Selon le Wall Street Journal, la plateforme Coinbase Global a versé 170 millions de dollars à la campagne de l’ancien président.

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les cryptos ont clairement pris, depuis 2020, un aspect politique indéniable. Ce sont des actifs désormais ouvertement prisés et défendus par les extrêmes droites. En France, en 2022, Éric Zemmour avait prononcé un discours de soutien à cette industrie, accompagné d’un programme de dérégulation.

Au Salvador, le président Nayib Bukele, proche des milieux cryptos états-uniens, a développé un régime ultra-sécuritaire fondé sur l’adoption du bitcoin comme monnaie officielle. En Argentine, Javier Milei a permis la ratification de contrats et certains paiements en bitcoin.

Puis

Cette stratégie permet de défendre des positions encore plus radicales sur le plan économique qui ravissent les plus riches de la planète : retrait massif du rôle de l’État, développement de la marchandisation de la société, dérégulation des marchés, destruction de toutes les protections sociales

Pour Trump, c’est un angle d’attaque qui permet de saisir du mécontentement à l’encontre de la gestion de Joe Biden, qui a basé sa politique de croissance sur l’intervention de l’État. Mais c’est aussi un moyen de s’attacher le soutien de milliardaires qui défendent cette vision libertarienne. Aussi est-ce dans ce cadre qu’il faut comprendre la montée de cette extrême droite techno incarnée, entre autres par Elon Musk, et qui est clairement derrière Donald Trump.

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La communauté crypto, désormais obsédée par la valorisation de son portefeuille d’actifs et rétive à toute forme de régulation, est l’exemple même de cette convergence entre libertarianisme et extrême droite.

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Trump reprend ici l’idée d’une sénatrice du Wyoming, Cynthia Lummis, qui a déposé une proposition de loi visant à créer une réserve d’un million de bitcoin (environ 64,5 milliards de dollars) sur cinq ans, que le gouvernement états-unien garderait pendant au moins vingt ans. Les fonds seraient gérés par le Département du Trésor.

Cette proposition serait évidemment une bénédiction pour l’industrie et les possesseurs de cryptos. Comme le nombre de bitcoins est limité et que la création de nouvelles unités est très faible, les rachats du Trésor états-unien provoqueraient sans doute de nouvelles envolées des prix. L’État y perdrait des plumes, mais les investisseurs feraient de beaux bénéfices, qu’ils pourraient réinvestir dans d’autres cryptos.

Le marché « libre » serait alors soutenu par la première puissance économique du monde, disposant de fonds en dollars quasi illimités. Il s’agirait évidemment d’une subvention géante aux cryptos.

La conversion au bitcoin de Donald Trump est donc sans doute plus qu’une simple lubie d’un ancien président épaté par des NFT de lui-même. C’est le signe d’une évolution interne au capitalisme contemporain où l’extrême droite autoritaire, xénophobe et réactionnaire apparaît comme une solution pour certains secteurs économiques. Une évolution qui ne se limite pas aux États-Unis.


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