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Comment les studios ukrainiens travaillent en temps de guerre

Lorsqu'on se rend à la BnF pour assister à une conférence consacrée aux studios de jeu ukrainiens, on s’attend à entendre parler de collègues partis au front et de développement interrompu par les coupures de courant et les alertes aériennes. Mais on découvre aussi que le jeu vidéo ukrainien, tiraillé entre tensions linguistiques, chaos politique et autorités peu coopératives, est une parfaite synthèse du pays lui-même.

Threshold

Amis chômeurs, sachez-le, quand on veut, on peut. Prenez le héros de Threshold. Il s’est bougé les fesses, a signé un mystérieux contrat et paf, à lui le boulot de rêve : chef de gare au sommet d’une haute montagne, où il doit siffler pour guider le conducteur d’un mystérieux train. Certes, il n’y a guère d’oxygène à cette altitude, mais son entreprise lui en fournit gracieusement sous forme de capsules en verre qu’il doit casser avec les dents. Mais c’est comme ça, dans la vie on n’a rien sans rien.

Télex

Pour changer un peu des chiffres de ventes, voici des chiffres de mods. Depuis la mise à jour finale de Baldur's Gate 3 en septembre, qui ajoutait au jeu des outils de modding, c'est plus de soixante dix millions de mods qui ont été downloadés. Alors que seulement 3000 ont été uploadés, bravo les gens, c'est toujours les mêmes courageux qui bossent pendant que les autres se laissent porter. LFS.

Vous avez dit Blizzard

En novembre dernier, Blizzard avait sorti deux remasters de Warcraft 1 et 2, vendus respectivement 10 et 15 euros. Un move étonnant, sachant qu'on se demande bien qui aura envie de payer ce prix pour rejouer à des jeux à l'UI d'un autre âge, même vaguement embellis par des graphismes cartoon dignes d'un jeu mobile. Sans doute pour convaincre les réticents, Blizzard a demandé à GoG de retirer de la vente les versions originales des premiers Warcraft. Manque de bol, les jeux venaient d'être intégrés au programme « préservation » de GoG, qui garantit que les jeux « culturellement importants » seront patchés pour continuer à tourner sur le hardware moderne. Bon joueur, CDProjekt a annoncé qu'il continuerait tout de même à patcher les jeux après leur retrait de sa boutique, et a même créé un code promo, « MakeWarcraftLiveForever », offrant une ristourne aux gens qui souhaitent les acheter avant leur retrait définitif le 13 décembre 2024. LFS.

Télex

Désolé de vous l'apprendre, mais la version 1.4.5 de Terraria ne sortira pas cette année, Re-Logic refusant de faire cruncher ses employés « pour respecter une deadline arbitraire ». Comportement scandaleux de la part d'un studio qui continue de fournir des mises à jour gratuites à un jeu que tout le monde a acheté dix balles il y a bientôt quinze ans. LFS.

Sanctuary cantonais

Vous êtes en retard dans vos cadeaux de Noël (et même très en retard si vous lisez cette news dans l'édition papier de Canard PC parue en janvier) ? Vous ne savez pas quoi offrir à votre petit cousin gamer qui a déjà tout (sauf une RTX 4090, mais bon faut pas pousser non plus) ? Bonne nouvelle, pour seulement 30 €, vous pouvez lui offrir Diablo IV : Dark Delicacies, un livre de recettes inspiré de l'univers de Diablo, car après tout pourquoi pas. Après avoir regardé la vidéo promotionnelle, deux conclusions : (1) ça va, ça a l'air mangeable et (2) on peine quand même à voir le rapport avec Diablo hormis le fait que les assiettes sont posées sur une sorte de nappe en toile de bure médiévale. J'attends bien davantage la sortie de Stalker 2 : cuisiner dans la Zone, avec cinquante recettes pour accommoder pain rassis et vieilles saucisses séchées. LFS.

Fuite dans la valve

En 2021, les développeurs d'Overgrowth, Wolfire Games, avaient porté plainte contre Valve pour abus de position dominante, arguant que Steam abuserait de son quasi-monopole sur le marché du jeu PC pour imposer aux développeurs sa dîme de 30 %. Un juge avait à l'époque rejeté la plainte, mais autorisé Wolfire à la reformuler et à la soumettre à nouveau. Ce que le studio a fait, lançant une nouvelle plainte en 2022 qui, après quelques années passées dans les tuyaux de la justice américaine, vient de connaître un développement intéressant : la plainte de Wolfire est aujourd'hui devenue une class action, à laquelle peut se joindre n'importe quel studio ou particulier ayant vendu un jeu sur Steam. Par ailleurs, l'argument de Valve en 2021 (« nos 30 % ne sont pas de l'extorsion, c'est la norme dans le milieu ») porte beaucoup moins aujourd'hui, alors que l'EGS et Microsoft prélèvent seulement 12 %. Rien n'est bien sûr joué, mais si Wolfire devait finir par l'emporter, Valve risque de devoir payer une fortune en dédommagements aux développeurs lésés. LFS.

Navigation en eaux troubles

« Comment diable regarder quelque chose dans son navigateur tout en jouant à un jeu vidéo ? » À cette insoluble question, que se posent régulièrement tous les gens qui n'ont jamais entendu parler du concept de deuxième écran ni de celui d'alt+tab, Microsoft apporte une réponse : le Edge Game Assist. Derrière ce nom qui ressemble à celui d'un sextoy se cache une idée pas si bête : un navigateur (Edge, en l'occurrence) qui s'affiche par-dessus le jeu, permettant de consulter, par exemple, un wiki ou une soluce lorsqu'on est bloqué. Et pas grand-chose de plus pour le moment, puisque le joueur doit effectuer lui-même la recherche sur l'élément qui l'intéresse, le navigateur étant incapable de tirer la moindre information contextuelle du jeu. LFS.

Subnautica 2

Désolé de vous le dire de façon aussi sèche – sans mauvais jeu de mots –, mais je suis beaucoup plus qualifié que vous pour juger Subnautica 2. Non que je sois un spécialiste des jeux de survie (mon record absolu dans DayZ est de cinq minutes avant de mourir) ou parce que je suis journaliste spécialisé en jeu vidéo (ça n'existe pas, c'est un faux métier) mais tout simplement parce que, contrairement à vous, j'ai relancé l'original il y a trois mois. Et qu'il ne ressemble pas du tout, mais alors du tout, au souvenir que vous en avez.

Nazis mineurs

Les développeurs de Rebellion, le célèbre studio anglais passionné par l'anatomie interne du corps humain, l'affirment : la série des Sniper Elite continuera à se dérouler durant la Seconde Guerre mondiale, contrairement à d'autres licences militaires à succès (suivez mon regard) qui ont pris l'habitude de sauter de conflit en conflit au gré des épisodes. « La Deuxième Guerre mondiale est le dernier conflit dans lequel on pouvait avoir un type et son fusil seul contre des nazis », explique monsieur Beck Shaw. Alors oui monsieur Shaw, mais surtout parce qu'il y avait moins de nazis au Vietnam, par exemple. Dans tous les cas, vous pouvez faire une croix sur un Sniper Elite: Modern Warfare, un Sniper Elite: Révolution mexicaine ou, et c'est bien dommage, un Sniper Elite: guerre du Péloponnèse. LFS.

Take a woke on the wild side

Si vous trouvez que le jeu vidéo est devenu la poubelle idéologique de développeurs wokistes, vous serez heureux d'apprendre que Shibetoshi Nakamoto, créateur du Dogecoin et membre éminent de la cour d'Elon Musk sur X, est du même avis. Également obsédé par cette question, Musk a immédiatement répondu au message de Nakamoto en expliquant que X AI allait lancer son studio de jeux vidéo générés par IA pour « make videogames great again » et proposer une alternative aux grands éditeurs devenus woke, car il est bien connu que personne n'est plus gauchiste qu'une multinationale. Vu la tendance de Musk à l'histrionisme et les succès de la génération de jeux par IA, les chances que ce studio voie vraiment le jour sont bien sûr infimes. D'ailleurs je prends ici le pari : si ce machin sort un jour le moindre jeu, je m'engage à acheter un abonnement X premium. LFS.

Stalker 2 : Heart of Chornobyl

La plupart du temps, quand j'ai fini d'écrire sur un jeu, je le désinstalle. Mais pas toujours. Il existe une petite douzaine d'exceptions, des jeux qui n'ont jamais quitté mon SSD, que je conserve au cas où je serais saisi d'une brusque envie d'errance (Euro Truck Simulator) ou de fusillades (Ready or Not). Mais après ces quelques jours passés dans la Zone, je les ai tous effacés. Pas faute de place, pour libérer les 160 Go nécessaires à Stalker 2, non. Simplement parce je sais que je n'en aurai plus jamais besoin. Désormais, j'ai Stalker 2, le jeu vidéo ultime. Ce qui n'est pas forcément un compliment.

Worshippers of Cthulhu

J'ai encore fait ce rêve étrange et pénétrant. J'étais un bébé, assis sur une chaise haute. Devant moi se tenaient mes deux papas, ackboo et Izual, qui essayaient en vain de me faire avaler un médicament dégoûtant sur lequel était écrit « city-builder ». Puis ackboo a eu une idée : cacher la gélule dans le contenu d'un petit pot orné du signe des Anciens. Miracle, je l'avalais goulûment. « Comme quoi il suffisait d'ajouter du Lovecraft pour qu'il s'y mette ! », s'exclamait alors Izual, juste avant que je me réveille.

Straftat

« Tu as les yeux qui brillent quand tu parles de Straftat, ça faisait longtemps que je ne t’avais pas vu comme ça ! », me dit Ellen Replay, ce qui fait plaisir. D’habitude, quand je montre Straftat aux gens, tout ce qu’ils trouvent à dire est « mais c’est quoi ce truc tout moche ? ». Oui, « tout moche », rien que ça. Alors qu’ils sont devant le meilleur FPS de 2024.

Sea Power : Naval Combat in the Missile Age

C'est fou comme une petite précision peut tout changer. Si « bataille navale » évoque de tranquilles parties de jeu de société en famille, « bataille navale à l'ère des missiles » convoque des images d'épouse et d'enfants terrifiés par un gros nerd qui les oblige à jouer chaque week-end à un wargame où il faut apprendre par cœur les différences de charge militaire entre les ogives du RGM-84 et du SS-N-2. Sans surprise, Sea Power : Naval Combat in the Missile Age tombe dans la deuxième catégorie, celle des jeux qu'on qualifie pudiquement d'exigeants.

Clickolding

Depuis le temps que cette rubrique puise dans les recoins les plus sombres, étranges, pour ne pas dire malsains d’itch.io, ça devait finir par arriver. Eh bien ça y est, nous y sommes, nous avons fini par basculer dans la perversion pure et simple. Dans le cabinet de ce mois-ci, je vous propose donc d’aller retrouver un vieux monsieur bizarre dans une chambre d’hôtel pour réaliser son fantasme le plus secret.

Télex

Vous vous souvenez de Fntastic ? Parce que les gens qui ont précommandé The Day Before, leur jeu de survie sorti tellement pété que Steam l'a retiré de la vente, eux, s'en souviennent. Nés avant la honte, les développeurs de Fntastic sont récemment revenus d'entre les morts en mode « hé les gars allez on oublie tout et on recommence », avant d'organiser un concours offrant à leur communauté de créer les cartes de leur prochain jeu gratuitement. LFS.  

Prompt à faire des bêtises

De toute l'histoire humaine, même en incluant le punk et Diogène de Sinope, personne n'a jamais atteint un stade de « je n'en ai plus rien à foutre » équivalent à celui des fondateurs de la startup Tales. Passe encore que ces derniers, perchés sur le nuage de kétamine qui flotte au dessus de la Silicon Valley, aient réussi à vendre à des investisseurs crédules la promesse d'une technologie qui permettra, je cite, « de générer un jeu AAA à partir d'un simple prompt IA ». Là bon, c'est n'importe quoi, on est d'accord, mais les promesses n'engagent que les gogos prêts à les croire. Là où ça devient dingue, c'est que pour faire la promotion de leur technologie, ils ont utilisé des images générées par leur moteur qui ressemblent trait pour trait aux jeux sur lesquels le modèle a été entraîné, avec notamment un clone d'Aloy, l'héroïne d'Horizon Zero Dawn. On admire l'audace et on attend la réaction des avocats de Sony. LFS.

Télex

Une interview de Kojima, c'est toujours une longue trajectoire, un peu comme des montagnes russes ou une montée d'acide. Dans un récent entretien avec le média japonais Anan News, il commence par dire des choses assez justes (« Il faut ne créer que des jeux auxquels on croit, qui ressemblent à ce qu'on voudrait laisser de nous après la mort ») puis détache les petites roues et explique qu'il aimerait bien distraire les défunts en continuant son métier de game designer dans la tombe. Et je trouve ça assez beau. LFS.

Prison ferme

Qu'importent les risques d'être accusé d'apologie d'escroquerie, je le dis : l'arnaque montée par Mehmet Aydin et son frère force le respect. Cet ancien rappeur turc a en effet créé un clone de Farmville du nom de Farm Bank, qui comme son nom l'indique à moitié propose aux gens d'investir dans leur ferme. En pratique, l'argent dépensé dans le jeu sous forme de microtransactions devait servir, d'après Aydin, à mettre en place une exploitation agricole bien réelle, qui aurait reversé des dividendes à ses « investisseurs » lorsqu'elle aurait réalisé des profits. Le pitch a incroyablement bien fonctionné, plus de 130 000 joueurs claquant 300 millions de dollars dans l'affaire. Bien sûr, aucune ferme n'a jamais été bâtie, Farm Bank n'étant qu'une banale pyramide de Ponzi : l'argent reversé aux premiers joueurs était celui des derniers arrivés. Comme toujours, cela a fini par se voir et Aydin a été condamné à 88 000 ans de prison. Oui oui, 88 000. Ça peut sembler beaucoup mais il ne faut pas oublier que les Turcs vivent extrêmement vieux grâce aux vertus curatives des eaux du Bosphore. LFS.
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