Vue lecture

La Rénovation Urbaine à portée de baffes… financières !

(Visuel d’une déambulation dans le quartier Sabatier à Raismes)

Itinéraire d’une enfant(encore)gâtée…, la rénovation urbaine de proximité !

Prenons la hauteur d’un drone, à la fois assez haut pour comprendre la vue d’ensemble et pas trop pour déceler les retombées locales d’un tel investissement. En effet, si vous prenez en compte le constat simple que près de 70% des investissements publics en France sont portés par les collectivités publiques de proximité, et concomitamment une proposition à ce stade d’un gel de la DGF (Dotation Générale de Fonctionnement) pour ces institutions publiques, d’une réduction drastique du fonds vert, et d’autres velléités du même acabit, vous avez les prémices d’une crise puissance XXL. Mieux vaut 2 euros investis pour en rapporter 5 que 2 euros reportés sine die… !

Quelles sont les garanties pour le « Logement » obtenues par la Ministre de plein exercice, Valérie Létard, pour accepter cette fonction prestigieuse compte tenu que le Front Républicain l’obligeait à respecter certaines aspirations dans la 21ème circonscription ? L’heure de vérité approche à grand pas. Certes, tout acquis, voire nouveau dispositif favorisant des chantiers urbains locaux serait un bon signal aux acteurs concernés, mais si le budget 2025 réduit l’action en matière de construction ou réhabilitation de logements, comme celui du Fonds Vert, véritable outil de bouclage d’un dossier à ce stade, le seul gyrophare passerait pour un calcul politique !

Le RU Tour

En propos liminaire à cette revue urbaine, le Président de La Porte du Hainaut, Aymeric Robin, rappelle l’engagement de l’agglo à hauteur « de 30 millions d’euros sur l’ensemble de ces programmes de Rénovation Urbaine. C’est un travail collectif avec l’ensemble de nos partenaires où nous avons eu une phase projet, puis une période d’études (sans oublier l’incontournable passage d’un financement gravé dans le marbre) et dorénavant nous sommes dans une phase opérationnelle ». On peut se féliciter sur la temporalité où le coup de pioche parti assure une continuité des chantiers. Que se serait-il passé si les conventions diverses et variées devaient se signer… maintenant sur ces mêmes opérations ci-dessous ?

Donc, pour matcher un propos macro à l’effectivité microéconomique, La Porte du Hainaut a organisé un RU Tour sur les communes où des chantiers urbains majuscules sont en cours comme à Raismes, Escaudain, Lourches, La Sentinelle, Denain et Wallers Arenberg. 

(Raismes) Le quartier de Sabatier et son quartier à 2 800 âmes

Sur la commune de Raismes, le quartier Sabatier est quasi une collectivité locale stricto sensu. Avec sa Maison de quartier, son église polonaise, ses 2 800 habitants et à l’horizon d’une décennie 3 800 environ, cet espace urbain né pour accueillir une pollution complètement dédiée au travail dans la mine est classé « Bassin minier- Patrimoine mondial UNESCO » comme celle de Wallers Arenberg. 

La réhabilition lourde des habitats miniers et des espaces publics s’avérait indispensable. Le résultat est impressionnant, rénovation intérieure complète avec un volet efficacité thermique, uniformité des couleurs en extérieur, création d’une place de stationnement privative, et récupération de l’eau de pluie sur l’espace privé réinjecté vers les sanitaires par exemple. Bien sûr, les voiries attenantes sont également refondues, le verdissement une signature, les réseaux refaits même s’ils restent les effacements de ces derniers. « Nous travaillons les espaces verts avec une gestion différenciée. Par exemple, nous gérons les haies entre les maisons des particuliers, ce n’est pas facile pour l’entretien, mais nous devons le mettre en place dans le cadre d’un site UNESCO », précise Jean-Paul Mottier, adjoint en charge des travaux sur Raismes.

Sur le quartier Sabatier, c’est le dispositif ERBM (Engagement pour le Renouveau du Bassin minier) initié par Bernard Cazeneuve dont nous voyons l’efficacité. A la clé 193 logements rénovés par le bailleur social SIA, 581 par le bailleur social Maison et Cités, 8 km de voirie, des équipements publics, le réseau d’assainissement par NOREADE dont la première mission, conformément à la loi, a été de diviser le réseau d’assainissement des eaux usées avec les eaux de pluie. En digression, l’historique tuyau unique eau de pluie/eaux usées démontre l’absence totale de réflexion environnementale dans l’urbanisme du XXème siècle ! Aujourd’hui, la pénétration dans le sol là où tombe la goutte de pluie avec des matériaux adaptés est la norme. On parle désormais de la «désimperméabilisation » des sols. 

Le plus emblématique espace au sein du quartier Sabatier est la « Cité-Jardin » du Pinson. D’ailleurs, elle vient d’intégrer l’association dédiée à la protection et promotion des cités-jardins dans le Nord Pas-de-Calais.

Bien sûr, la particularité de ce quartier est sa coexistence avec la forêt, les connexions sont multiples même si le danger des dépôts sauvages de déchets, surtout venus par des extérieurs, est prégnant. « L’ONF est le gestionnaire de la forêt. Grâce à des dispositions prises avec le Parquet de Valenciennes, l’ONF peut aujourd’hui saisir les véhicules, moto, quad, etc. Des caméras vidéo sont aussi installées afin de repérer les plaques d’immatriculations des voitures », ajoute Jean-Paul Mottier.

(Escaudain/Lourches) La cité Schneider partagée entre deux communes

Lorsque vous parlez d’imbrication des quartiers urbains, vous pensez à la cité Schneider sur 3 communes en « Politique de la Ville », Lourches, Escaudain et Rœulx, mais les travaux de rénovation lourde ne concernent que Lourches et Escaudain. 

Cette fois, ce vaste périmètre n’est pas concerné par l’UNESCO et quelques libertés à la clé. La rénovation lourde en intérieure, voire une isolation en extérieure, avec un mariage couleur gris clair/rouge assez réussi (photo d’accueil). De même, les voiries de toutes les rues et la création de nouveaux espaces publics. « Le rôle de ces rénovations s’exprime également dans la création de nouveaux espaces de centralité (visuel). Dans ce cadre, nous créons une place publique avec un aménagement paysager en direction du Terril Schneider », indique une responsable de projet sur Escaudain/lourches. 

« Les deux villes ont collaboré solidairement depuis le début de ce dossier. Nous avons un projet d’ensemble cohérent », souligne Bruno Saligot, le maire d’Escaudain. D’ailleurs, pour Dalila Duwez, la séparation est seulement administrative, car « il n’y a pas de frontières entre ces deux villes pour les habitants ».

Concrètement, en phase une, 187 logements sont rénovés sur les deux communes, mais également 108 démolitions pour lesquelles aucun projet arrêté n’est actif. « Ce sont des friches et nous réfléchissons à un aménagement possible », évoque la maire de Lourches.

(Denain) Le glossaire de la rénovation urbaine

Sur les 82 communes du Valenciennois, le nouveau coup de pinceau urbain sur Denain est gigantesque. Gargantuesque dans la consommation de fonds d’Etat, régionaux, dispositifs multiples, et si vous voulez réviser la rénovation urbaine dans toutes ces phases, de la récupération du foncier amiable ou exproprié, à la construction en passant par l’accompagnement, vous passez 8 jours sur Denain et dialoguez avec les multiples partenaires associés.

En l’espèce, nous parlons à Denain principalement du NPNRU (Nouveau Plan National de la Rénovation Urbaine) initié par Manuel Valls. Le chiffre global est vertigineux avec des opérations chiffrées à hauteur de 95 645 200 euros, 32 millions d’euros de l’ANRU, 14 964 000 pour la CAPH, 5 256 000 euros par la Région Hauts de France et 20 252 000 euros par la commune. 

Centre-ville de Denain, chantier en cours…

Bien sûr, des îlots de logements, le fameux quartier BASLY dont l’EPF (Etablissement Public Foncier) avait déjà fait des acquisitions en… 2006. La Place Gambetta, et d’autres quartiers, sans oublier le centre-ville dégradé où « la particularité de centre-ville de Denain est qu’il y peu de logements sociaux, mais beaucoup de petits propriétaires sans moyens financiers pour rénover leur habitat », explique une cheffe de projet. Au NPNRU sur les quartiers extérieurs vient s’additionner le fonds « Coeur de Ville » pour l’aménagement du centre-ville de Denain. Deux kilomètres de voirie, le long de la rue Villars, traverse ces différentes rénovations urbaines des quartiers de Denain.

La deuxième ville du Valenciennois, comme beaucoup d’autres cités minières, n’avait pas de centre-ville ou si peu. C’est pourquoi, la refonte totale de l’espace public est massive et impressionnante. Cette dernière fait donc partie d’une nouvelle réflexion urbaine au bénéfice du mieux-vivre pour les habitants. 

(La Sentinelle) Une vitrine d’un savoir faire urbain en entrée de la ville-centre

Le cas de la commune de La Sentinelle est particulier, car son maillage avec la ville-centre au sein du quartier de la Chasse Royale est singulier. Eric Blondiaux, le nouvel édile depuis 2020, est conscient de cette collaboration urbaine. « Nos réalisations participent à l’image de notre commune, porte d’entrée de la ville-centre. D’ailleurs, nous travaillons étroitement avec Valenciennes concernant les travaux de l’entrée Nord. Chaque maire voudrait porter un projet comme celui-ci », précise-t-il.

La restauration scolaire sur la gauche et l’école maternelle sur la droite

Logements, mais également la construction d’une nouvelle école maternelle, en ossature bois, et d’une restauration scolaire commune à l’école élémentaire et la nouvelle maternelle. Huit classes, une bibliothèque, deux dortoirs avec une fin des travaux en juin 2025. Autour de cette école, il y aura un nouveau terrain synthétique de football, un club house en habitat/Container par l’entreprise d’insertion Mokha.

(Wallers) Le renouveau du Bassin minier comme symbole

Bruno Salito, Salvatore Castiglione, et Eric Blondiaux

Enfin, la commune de Wallers Arenberg et son riche patrimoine minier souligne l’importance d’une rénovation de l’habitat tout comme d’un esthétisme d’ensemble. « 104 logements ont été identifiés dans le programme ERBM avec au final 90 habitats réhabilités dans les cités du Bosquet, Nouveau monde, et d’Arenberg. Ensuite, nous allons également réalisé la rénovation de la Place Casimir Perrier et des voiries attenantes. Enfin et surtout, les calendriers sont respectés pour l’ensemble de ces chantiers même si d’autres projets sont en réflexion sur l’église ». 

Après la Salle des Fêtes du Prince d’Arenberg, magnifique, le lycée professionnel, juste à côté de la précitée, totalement réhabilité avec un mariage moderne/ancien assez remarquable.L’intégration d’une maison France Services, d’un bureau de La Poste, des services municipaux comme le CCAS, d’une antenne de la région Hauts de France, la PMI, des salles de réunion partagées et d’autres espaces associés, fera date dans le partage des frais de fonctionnement, pas neutre à l’heure de la réduction de la dette publique. 

Pour le référent de la Mission Bassin Minier, « il y aura un avant et un après ERBM dans le cadre de vie, la gestion du patrimoine ». En effet, ce fonds d’Etat est encore vivant durant 3 ans et son remplacement serait opportun, car tout n’est pas fait dans les cités minières du Nord Pas-de-Calais.

Daniel Carlier

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Promenade associative dans les cités-jardins… pour les sauver !

(Les 3 maires fondateurs et la Directrice générale de la Mission Bassin Minier)

Les caractéristiques de la cité-jardin sont audacieuses. En effet, le verdissement constitue sa signature, le logement est individuel ou juste mitoyen, les murs respirent, les jardins se parlent, parfois la sinuosité de la voirie ajoute un charme désuet, le tout dans un quartier où vous retrouvez invariablement le triptyque école/salle des fêtes/église. Toutefois, le besoin massif de logements afin d’accueillir une vague de travailleurs venue de toute l’Europe et au delà de la Méditerranée, a fait nécessité au XXème siècle. Il fallait plus de logements d’où la naissance des corons miniers, des collectifs, et l’idée même de cité-jardin devenait incongrue, pas assez d’âmes entre 4 murs. Au fil du temps, certaines ont disparu de la carte urbaine, d’autres ont été sauvées in extremis. Enfin, certaines connaissent une deuxième vie aussi riche que la première.

Dans cette optique, depuis le 24 septembre sur le site minier d’Oignies, une nouvelle association s’est installée avec quatre membres fondateurs, l’association « Mission Bassin Minier » et les communes de Raismes, Dourges, et Noyelles-Godault dont l’objet sera la promotion de ces utopies urbaines. 

« On a explosé le cliché des bandes grises de logements », Catherine Bertram

Bien sûr, le premier outil, et la véritable opportunité urbaine afin de sauver ces patrimoines miniers se décline avec l’ERBM (Engagement pour la Rénovation du Bassin Minier), un fonds d’Etat dédié aux logements miniers signé en mars 2017 par le 1er ministre Bernard Cazeneuve. Sur 124 cités minières, 35 ont été sélectionnées pour ce programme beaucoup plus complet que tout autre dispositif précédent. « Il reste 3 ans de programme ERBM (et ses optimisations) où la performance thermique intérieure, les espaces extérieures, et aussi les espaces publics sont travaillés avec une exigence de qualité », commente Mélanie Delots, Directrice de projet du RBM dans le Nord Pas-de-Calais.

Cité-jardins pilote, quartier Taffin sur Vieux-Condé

A ce stade de l’ERBM, 20 cités minières, toutes typologies confondues, ont bénéficié de ce coup de pinceau ; les corons, des équipements remarquables, les espaces publics, et quelques cité-jardins. Avant ce programme, l’arrivée en juin de 2012 de la reconnaissance du « Bassin minier Patrimoine mondial UNESCO », cinq cités pilotes ont émergé dont la cité Taffin sur Vieux-Condé et le quartier Bruno à Dourges. Clairement, ces 5 cités ont tracé le chemin du futur ERBM, et notamment grâce à un référentiel élaboré par tous les acteurs (bailleurs, collectivités locales, association, population). « C’est un mode de faire, comme un cheval de Troie, où un esprit public se dégage afin d’améliorer les espaces intérieurs et extérieurs. Certes, c’est contraignant, car on joue dans le détail de la rénovation urbaine », analyse un chargé de mission de la Mission Bassin minier. De facto, le résultat est là, car rien n’a été laissé au hasard d’un permis de construire inamical.

Au delà de ce trait architectural, une réflexion plus aboutie est sous-jacente dont l’objet est de casser l’image d’Epinal des quartiers miniers. « On a explosé le cliché des bandes grises de logements. On a changé le regard. Les 53 cités-jardins se situent dans et hors du périmètre « Bassin minier-Patrimoine mondial UNESCO ». L’origine de ces cités-jardins est anglaise, les fameuses Garden Cities. D’ailleurs, il y a un collectif européen réunissant ces associations », commente Catherine Bertram, la directrice générale de la Mission Bassin minier. 

Trois communes en amont… !

Pour la création de « l’Association des Cités-Jardins du Bassin minier Nord Pas-de-Calais », le maire de Raismes, Aymeric Robin, était présent pour le quartier Sabatier et sa cité-jardin du Pinson : « C’est une idée un peu folle où nous voulons promouvoir les cités-jardins. C’est une rupture de la cité minière habituelle en ligne. Sur Raismes, nous avons la Cité du Pinson avec une grande richesse architecturale et paysagère. Plus globalement, elles doivent faire partie des futurs éco-quartiers ».

Sur Raismes, Cité-jardin du Pinson en bas de l’image

La maire de Noyelles-Godault, et Conseillère régionale, Valérie Biegalski, promeut sa cité-jardin Crombez où « nous avons 60% d’espace vert. Elle est visible et très connectée au reste de la commune ».

Enfin, le maire de Dourges, Tony Franconville, nous rappelle son histoire locale : « La cité-jardin Bruno est née vers 1904, elle a 120 ans cette année. Ce quartier a connu un chantier long de 2012 à 2017 ». Puis, le besoin de plus de logements a généré les corons tels que nous les connaissons. Comme le quartier Taffin sur Vieux-Condé, cet espace urbain a connu des choix difficiles afin de maintenir un tout, une pensée de la cité-jardin où chaque élément urbain public et privé est indispensable. 

Voilà, ces 3 communes, l’association MBM, mais également des experts membres, La Porte du Hainaut, les CAUE du Nord Pas-de-Calais et le bailleur social « Maisons et Cités (ex Soginorpa) » se lancent dans une histoire à écrire avec le secret espoir d’agréger au fil des années toutes les cités-jardins du Bassin minier. En île de France, une association similaire va fêter ses dix ans en 2024 et sa représentante témoigne des succès, tout comme des difficultés, pour défendre une certaine vision architecturale d’un quartier urbain. Cette idée est d’hier, d’aujourd’hui, et de demain mécaniquement compte tenu d’un haro environnemental sur l’étalement urbain.

Daniel Carlier

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