La 100Úme unité de méthanisation régionale célébrée sur Laon (Aisne)
(Photo du site/Crédit GRDF)
1Úre station de traitement des eaux usées dans les Hauts de France conjuguée à une unité de méthanisation
Laon dans lâAisne, lâancienne capitale de la France pendant prĂšs dâun siĂšcle (dĂšs 895) a Ă©tĂ© le théùtre dâune manifestation importante pour la production de biogaz injectĂ© le 03 juillet dernier. ConcrĂštement, une station existante de traitement des eaux usĂ©es du 20Ăšme siĂšcle Ă lâombre de la butte de Laon, de sa cathĂ©drale emblĂ©matique inspiratrice de Notre-Dame-de-Paris, a Ă©tĂ© rĂ©novĂ©e, Ă©tendue, et modifiĂ©e afin de transformer ses boues en biogaz.
Un petit retour en arriĂšre est nĂ©cessaire, car quelques dĂ©cennies plus tĂŽt, la loi permettait de dĂ©poser ses boues des eaux usĂ©es Ă lâair libre au bout dâun champ agricole pour sĂ©chage et obtenir un engrais. Inutile de souligner les dĂ©sagrĂ©ments olfactifs⊠pour le voisinage et la pollution des riviĂšres Ă la clĂ©, une catastrophe sur toute la ligne. Un ancien du quartier environnant de la riviĂšre de lâArdon, en bas de la butte de Laon, tĂ©moigne sur la difficultĂ© Ă rester dans le jardin avec lâodeur des boues fraĂźches⊠au bout du champ ! Heureusement, le lĂ©gislateur a imposĂ© une nouvelle norme dans le traitement de ses boues avec un stockage en milieu fermĂ©, nous y reviendrons !

En 2025, une station de traitement des eaux usées permet de générer du gaz vert. Certes, cette technique est moins performante que les déchets agricoles, mais une partie de ses boues génÚre du biogaz. Suivons le process de cette transformation :
Du dĂ©canteur primaire Ă lâinjection du biogaz dans le rĂ©seau GRDF

La premiĂšre Ă©tape est celle dâune sĂ©paration entre lâeau et les matiĂšres lourdes, les grosses matiĂšres oĂč boues primaires sont retenues dans un dĂ©canteur primaire, lâĂ©tape de base. Ensuite, un Ă©quipement de traitement tertiaire est la derniĂšre Ă©tape avant le rejet de lâeau dans son milieu naturel, en lâoccurrence dans la riviĂšre de lâArdon. Cette eau traitĂ©e passe par une zone humide afin de dĂ©velopper la biodiversitĂ© avant de reprendre son cours dâeau plus classique. A noter que le dĂ©bit de cette riviĂšre est assurĂ©e Ă 90% par cette station dâĂ©puration, le duo est de fait indissociable aujourdâhui. Hier, ce cours dâeau posait bien des problĂšmes avant cette crĂ©ation dâune station dâĂ©puration, notamment chez les propriĂ©taires fonciers oĂč passait cette riviĂšre lâArdon, un casse tĂȘte historique pour le maire rĂ©solu au dĂ©but des annĂ©es 90 au siĂšcle dernier.
TroisiĂšme Ă©tape, le fameux digesteur commun Ă toutes les unitĂ©s de mĂ©thanisation oĂč les boues sont dĂ©shydratĂ©es. Ces boues associĂ©es avec 10% dâapport extĂ©rieur passent par cette Ă©tape de fermentation afin de dĂ©gager du mĂ©thane (CH4). La part de boues transformĂ©es en biogaz est de 43% environ. Pour le reste, ce sont des boues dont le sĂ©chage sur la durĂ©e se transforme en engrais. Puis, ils sont utilisĂ©s pour de lâĂ©pandage dans les champs agricoles.

Ensuite, retirer lâeau du gaz, câest lâĂ©tape de la purification du biogaz arrive afin de le valoriser en biomĂ©thane, ce passage est indispensable avant lâinjection dans le rĂ©seau GRDF. Bien sĂ»r, le stockage des boues rĂ©siduelles est essentielle. Aujourdâhui, elles passent au chaulage et sont stockĂ©es durant 9 mois dans un site fermĂ© de 1 600 m2, puis lâĂ©pandage durant 3 mois. « LâintĂ©gralitĂ© de ses boues est utilisĂ©e au sein des champs agricoles dans le 50 km environnants. Il y a plusieurs Ă©tapes avant lâĂ©pandage, notamment lâhygiĂ©nisation de ses rĂ©sidus des eaux usĂ©es », prĂ©cise un technicien.
Enfin, lâultime Ă©tape avant lâinjection avec lâodorisation du biogaz injectĂ©, car le mĂ©thane est inodore dâoĂč sa dangerositĂ© sans cette initiative technique, puis le contrĂŽle final du produit avant lâinjection dans le rĂ©seau GRDF.
Produire de lâĂ©nergie verte demande de lâimagination
Sous un soleil de plomb, prĂšs de 250 personnes sont venues assister Ă ce moment particulier, en fait toute la filiĂšre du biogaz injectĂ© dans les Hauts de France. En effet, depuis 2011, et la premiĂšre unitĂ© de biomĂ©thane sur Sequedin, le chemin a Ă©tĂ© trĂšs long comme pour cette rĂ©alisation. « Nous avons entamĂ© cette rĂ©flexion sur cette station des eaux usĂ©es depuis 15 Ă 20 ans. A cet effet, nous avons visitĂ© des sites en Alsace et dans les Alpes, car notre station dâĂ©puration Ă©tait taillĂ©e pour 40 000 habitants. Il fallait de fait une extension de cet Ă©quipement et nous avons pensĂ© y associer une unitĂ© de mĂ©thanisation. Câest une opportunitĂ© Ă©cologique pour notre agglomĂ©ration », commente Eric Delhaye, le maire de Laon et PrĂ©sident de la communautĂ© dâagglomĂ©ration.
Aujourdâhui, la station de traitement des eaux usĂ©es a « upgradĂ© » jusquâĂ 45 000 habitants et injecte dans le rĂ©seau du gaz vert assurant une autonomie Ă©nergĂ©tique dans certains quartiers de la commune. Câest la 1re station de traitement des eaux usĂ©es dans les Hauts de France conjuguĂ©e Ă une unitĂ© de mĂ©thanisation. Le coĂ»t global est de 14,9 millions dâeuros avec un soutien de lâEtat, du Conseil dĂ©partemental de lâAisne, de lâagglo, du syndicat agricole et de la commune de Laon.
Pour le Directeur gĂ©nĂ©ral de lâentreprise SUEZ, Arnaud Bazire, « cette installation est trĂšs symbolique. » En effet, le traitement des eaux usĂ©es, comme potable, constitue un sujet de premier plan pour toutes les intercommunalitĂ©s. En lâespĂšce, lâassociation dâun traitement des eaux usĂ©es, avant un rejet dans le milieu naturel, tout en le conjuguant Ă la production dâune Ă©nergie verte, coche beaucoup de cases. « Lâeau est une prĂ©occupation des citoyennes et des citoyens », ajoute-t-il. En effet, le dĂ©bat sur lâeau sera une constante dans les prochaines dĂ©cennies pour les collectivitĂ©s publiques, notamment son assainissement !
Concernant le dĂ©partement, il joue « son rĂŽle dans lâamĂ©nagement du territoire et ici depuis 1995 avec la crĂ©ation de cette station de traitement des eaux usĂ©es », indique Mathieu Fraise, vice-prĂ©sident du Conseil dĂ©partemental.
Pour FrĂ©dĂ©ric Motte, prĂ©sident de la mission rev3 au sein du Conseil RĂ©gional, cette 100Ăšme unitĂ© dâinjection concrĂ©tise « une dynamique de la filiĂšre du biogaz injectĂ© dans la rĂ©gion Hauts de France. » A cet effet, le collectif CORBI, rĂ©unissant tous les acteurs concernĂ©s, accompagne depuis tous les porteurs de projet https://www.va-infos.fr/2017/06/13/biomethane-avance-urbi-corbi-hauts-de-france/ avec une majoritĂ© dâagriculteurs.
Enfin, la prĂ©fĂšte de lâAisne, Fanny Anor, souligne cette volontĂ© dâune « Ă©conomie circulaire. Sur cette rĂ©alisation, lâAgence de lâeau de lâAisne et le fonds FNADT ont soutenu cette crĂ©ation dâune unitĂ© de mĂ©thanisation. »
Etape Métamorphose

LâaprĂšs-midi sâest poursuivie avec une table ronde tournĂ©e vers lâavenir et un oeil aiguisĂ© dans le rĂ©tro. Bien sĂ»r, le premier intervenant Ă©tait Philippe Vasseur, ex Ministre de lâAgriculture https://www.va-infos.fr/2024/09/26/philippe-vasseur-lhomme-plus-loin/ , mais surtout le 1er responsable des Ă©quipes rev3 de CCIR et de la RĂ©gion, met en avant « un moment oĂč le monde bascule. Câest pourquoi, il fallait sâengager pour avoir un temps dâavance.» Les choses ont bien Ă©voluĂ© depuis la 1Ăšre unitĂ© en 2011, en 2016 la signature dâun Manifeste https://www.va-infos.fr/2016/09/25/methanisation-presente-interet-manifeste/ oĂč le CORBI affiche son ambition et des perspectives dâune filiĂšre de biomĂ©thane injectĂ©e. On ne parle plus dâun coup par coup, mais dâune rĂ©flexion globale, dâune ambition de production de gaz vert chiffrĂ©e, mais surtout de crĂ©er un Ă©cosystĂšme autour des porteurs de projet pour lesquels lâinstallation nâest pas un long fleuve tranquille.
Câest pourquoi, FrĂ©dĂ©ric Motte avec Didier Cousin, successeur de Philippe Vasseur, souligne lâimportance du CORBI : « Câest le bon outil pour une bonne pratique. »
Pour Didier Cousin, vice-prĂ©sident Ă la CCIR en charge des transitions rev3 et aussi Directeur Territorial rĂ©gional de GRDF, des Ă©tapes sont indissociables dâune installation dâune unitĂ© de mĂ©thanisation : « Il y a un enjeu dâacceptabilitĂ© par la population. »
Pour sa part, le bras armĂ© de lâEtat, lâADEME, souligne les critĂšres de dĂ©veloppement de la mĂ©thanisation : « La solvabilitĂ© des projets, le renforcement des emplois dans la filiĂšre, la rĂšglementation, lâoffre de formation pour les porteurs de projets, et une information plus large vers la population sur ces installations. »
A lâhorizon 2030
Pour le mix Ă©nergĂ©tique https://www.va-infos.fr/2024/06/05/la-decarbonation-avec-le-gaz-vert-une-realite-complementaire/, la production de biogaz injectĂ© constitue une rĂ©alitĂ© du mix Ă©nergĂ©tique indispensable Ă lâautonomie française en la matiĂšre. Avec plus de 100 unitĂ©s, 2,3 Terawattheures, soit 385 000 logements chauffĂ©s au gaz) et par capillaritĂ© Ă©viter lâĂ©mission de 450 000 tonnes de CO2, le CORBI vise les 7 TWT Ă lâhorizon 2030.
Daniel Carlier
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