Droit de Réponse de M. Oussama Mouftah, Directeur de Cabinet à Douchy-les-Mines, suite aux allégations publiées dans la presse.
Oussama Mouftah : « J’ai remis en cause un système ! »
Débutons par le commencement, qui est M.Oussama Mouftah à titre professionnel ? Agé de 41 ans, il traverse ses études avec un cursus consacré à la sociologie politique entremêlé par des concours de l’IRA (INSTITUTS RÉGIONAUX D’ADMINISTRATION). « Je n’ai pas achevé ma thèse en sociologie politique, sur le lien entre radicalité religieuse et politique, afin de passer ces concours », précise-t-il. Ensuite, il débute par des stages à la Préfecture de Lille (Ministère de l’Intérieur,) puis travaille au Ministère de l’Economie et des Finances (sous François Hollande), et enfin au Ministère de la Justice avec Taubira, puis Jean-Jacques Urvoas. « J’ai répondu à un poste ouvert comme conseiller sur les questions de laïcité et radicalisation pour la PJJ (Protection Judiciaire de la Jeunesse) au sein du Ministère de la Justice », ajoute-t-il
Aujourd’hui, c’est un fonctionnaire d’Etat du Ministère de la Justice détaché auprès de la commune de Douchy-les-Mines. Voilà pour l’atterrissage dans une mairie du Denaisis, un fief historique du Parti communiste où Michel Lefebvre, après 16 ans de mandat de maire, a transmis le témoin en 2018 à Michel Véniat, son adjoint !
Lien avec la famille Iquioussen
Bien sûr, ces liens familiaux établis et bien connus ont immédiatement posé un problème au nouveau Directeur de Cabinet, le nuage de l’entrisme politique plane rapidement sur La Maison du Peuple. « Dès ma prise de fonction, le soupçon est arrivé. Je suis le neveu de… (Famille Iquioussen) et je pâtis de cette filiation. Vous pensez bien qu’il y a eu toutes les vérifications par les autorités sur une radicalisation présumée ! J’ai même formé des magistrats sur la radicalisation. En fait, on ne m’a même pas laissé le temps de faire mes preuves », assène l’intéressé.
Concernant ses rapports avec la famille, il insiste sur le fait « que je n’ai pas vu Hassan Iquioussen depuis 20 ans. Ce reproche est un peu celui de l’arroseur arrosé. Michel Lefebvre, dans le cadre de l’élection cantonale en 2015, est venu à la rencontre de la communauté et a visité la famille Iquioussen (comme d’autres politiques du Denaisis ont bénéficié du vote de la communauté pour l’élection municipale 2020) », tance le Directeur de Cabinet.
Ensuite sur l’influence présumée sur le Premier magistrat en place. « On m’accuse d’emprise sur le maire. Alors, pourquoi après quelques semaines seulement, le maire a-t-il reçu un courrier de l’ancien édile pour lui indiquer qu’il était mal conseillé ? », répond Oussama Mouftah. Il poursuit son propos : « J’assure mes missions de conseiller du maire sur la stratégie et la politique à conduire. On ne peut pas me reprocher de bien faire mon travail ! Je suis au service du maire, mais on me laisse la place que l’on veut bien m’accorder. »
Sur la lente scission entre une partie de la majorité, devenue minorité, et le maire, l’intéressé se défend de toute volonté à cet effet : « Je n’assiste pas aux Conseils municipaux, ni aux commissions. Il y a des personnes en charge de lancer les invitations (aux commissions), il peut y avoir un oubli ou un échec (d’envoi). »
« Je n’ai pas découvert un organigramme (Ressource Humaines), mais un arbre généalogique ! », Oussama Mouftha
En réponse à ses allégations sur un management décrié au sein de l’Hôtel de ville, il répond tout de go : « Mon problème, je ne suis pas carté au PCF, ni hier, ni aujourd’hui. J’ai tout simplement remis en cause un système. Je n’ai pas découvert un organigramme (Ressource Humaines), mais un arbre généalogique ! Il y avait du clientélisme et très peu d’encadrant. C’est une stratégie pour faire plaisir au plus grand nombre, on saupoudre avec plein de petits postes, mais sans encadrement. D’ailleurs, un rapport de la CRC à la fin d’exercice de Michel Lefebvre est sorti en pointant cette carence. »
Effectivement, le rapport de la Chambre Régionale des Comptes du 1er janvier 2018 indique : « La collectivité pâtit d’un manque d’encadrement. En effet, 2 % seulement des postes pourvus sont de catégorie A alors que le taux moyen pour les collectivités territoriales de la même catégorie est de 6 %5. En dehors du directeur général des services, seule la directrice des affaires financières est un cadre A de la filière administrative. » Par contre, ledit rapport souligne aussi que les comptes publics présentent « une assurance raisonnable de fiabilité » et de fait un recours à l’emprunt pour la réalisation de l’Imaginaire (l’emblématique bâtiment culturel), et plus globalement une politique culturelle ambitieuse à hauteur « de 12% des charges de fonctionnement du budget communal. »
Sur le même item et l’empreinte d’un communautarisme rampant : « Avant, il n’y avait aucune personne (arabe) au sein de la mairie. Qui est raciste ? Aujourd’hui, l’effectif communal reflète la réalité de notre population ! »
L’Affaire ALDI
Un potentiel foncier d’intérêt général ?
Certes, ce n’est la seule affaire foncière sulfureuse sur l’arrondissement du Valenciennois, mais la vente du local ALDI sur Douchy-les-Mines est un concentré de malaise ambiant au sein de cette collectivité locale. Démêler le faux du vrai, du dossier privé et public par destination, de la légalité à la moralité de l’initiative, c’est presque le nettoyage des écuries d’Augias, car tout s’entremêle, tout se connecte, les rumeurs galopantes fondées ou fantaisistes, et le tout avec un suivi par la presse locale donnant un peu plus de dimension à cette crise interne à la fois politique et organisationnelle.
Repartons de la base, l’enseigne Aldi décide de vendre un certain nombre de locaux en France dont ceux sur notre territoire à Denain et sur Douchy-les-Mines. Sur ladite cité, la surface disponible est de 950 M2 environ. C’est un bien privé à 100%.
Signalement au Procureur de la République !
Très rapidement, des questionnements ou manifestation d’intérêts apparaissent au sein du Conseil municipal de Douchy-les-Mines, dès avril 2022 à travers une question de F. Wojtowicz sur le montant de la mise en vente. Puis, en octobre 2023 sur l’identité de l’acquéreur et le devenir de ce local ; rebelotte avec des questions plus invasives au Conseil municipal du mois de février 2024 où M. F. Wojtowicz et M. A.Crombez s’interrogent sur la vente du local ALDI, alors qu’un intérêt pour la ville, maison médicale, relocalisation du CRP, salle des fêtes, etc., aurait pu s’étudier. En guise de réponse, le maire renvoie ces questions à une affaire privée, d’ailleurs relatée dans La Voix du Nord au mois d’août 2023. Toujours sur ce dossier, le conseil du mois de mars 2024 s’interroge encore sur cette transaction immobilière. Le dossier prend une telle ampleur qu’un signalement au Procureur de la République, via l’article 40, est réalisé le 29 janvier 2024 et une relance de ce suivi le 10 mars 2024.
Suite au signalement au Procureur de la République, une prise d’informations a été réalisée à cet effet. « Le rendez-vous a duré 20 minutes avec toutes les vérifications possibles par les autorités », explique le Directeur de Cabinet.
La DIA en fil rouge…
Particularité de ce Conseil municipal de Douchy-les-Mines, la liste des biens privés vendus passent par l’hémicycle local. En effet, la DIA (Déclaration d’Intention d’Aliéné), signée comme à chaque fois après la signature officielle d’un compromis de vente, informe la gouvernance locale qu’elle peut exercer son droit de préemption si et seulement si une délibération valide cette acquisition. Plus précisément, cette préemption doit aussi reposer sur l’existence d’un projet solide, déposé, étudié, même si les préemptions avec des projets nébuleux sont pléthoriques dans les 35 000 communes françaises. Le local ALDI répondait à tous les critères d’un bien préemptable par la collectivité locale de Douchy-les-Mines.
Et le dossier ALDI prend un chemin de traverse
Visiblement le dossier ALDI est resté au stade des questionnements au Conseil municipal et n’a pas généré le début du commencement d’un projet par la Gouvernance locale. « Trouvez-moi un seul écrit où la ville envisage un projet sur le site d’ALDI ? », commente le Directeur de Cabinet. Il explique ensuite son cheminent pour l’acquisition, via une SCI et un expert comptable, à travers « un réseau d’agences immobilière. D’ailleurs, je n’étais pas le premier intéressé. Le foncier (320 000 €) était déjà vendu à travers un compromis (et par suite lancement des diagnostics obligatoires), mais l’acquéreur n’a pas obtenu son emprunt. Comme investisseur, je me suis porté acquéreur à la suite de cette défaillance, l’affaire s’est fait très vite compte tenu de l’avancée du dossier précédent », explique Oussama Mouftha.
Le Directeur de Cabinet poursuit : « Existe-t-il une loi interdisant à un agent public d’investir dans la ville où il travaille ? » Certes, mais ce propos est à mettre en balance avec le devoir de probité des cadres, comme DGS ou Directeur de Cabinet, et une potentielle Prise illégale d’intérêts, si la personne a participé de près ou de loin à une procédure concernant ce bien, une influence sur la décision de préempter ou non, voire a tiré un avantage personnel, sans oublier un manquement potentiel à un devoir de probité si son rôle lui permettait d’obtenir des informations avant le public et d’en tirer profit.
Voilà l’imbroglio à démêler. Force est de constater avec un minimum de bon sens que le foncier ALDI était tout simplement radioactif compte tenu de l’intérêt porté, avant la vente effective, par des élus du Conseil municipal. L’autre point tangible est qu’aucun projet issu de la gouvernance locale n’a été évoqué officiellement ! Par suite, c’est un bien privé à 100% vendu à une société privée à 100%. A ce titre, dès que la vente est passée, le sujet est sans fondement public sauf que l’acquéreur est le Directeur de Cabinet. En résumé, l’achat par Oussama Mouftha pourrait être considéré comme inopportun compte tenu du contexte agité. Toutefois, la transaction semble légale faute d’une volonté d’activer le Droit de Préemption par la commune. Maintenant où se situe la frontière entre la prise illégale d’intérêts, une information privilégiée en mairie sur le local, et une acquisition classique en Droit privé ???
Sur la candidature de Romain Merville
Compte tenu de l’absence de candidature du maire sortant, le contrat de travail du Directeur de Cabinet s’éteindra le 15 ou le 22 mars 2026 mécaniquement. Pour la suite et l’engagement de Romain Merville, adoubé par le maire sortant, Oussama Mouftha réitère qu’il « sera le Directeur de Cabinet de Michel Véniat jusqu’à la dernière minute. Je ne suis pas le Directeur de Campagne de Romain Merville. J’étais invité à titre personnel à son lancement de campagne des Municipales 2026 et je n’ai pas accueilli la presse locale ! »
Pour la suite de la vie municipale à Douchy-les-Mines, Le Directeur de Cabinet précise que les « derniers conseils seront relatifs à la gestion de la commune. » En effet, le Ministère de l’Intérieur a donné aux prochains exécutifs locaux jusqu’au 30 avril, contre le 15 avril habituellement, afin d’organiser le débat d’orientation budgétaire, puis le vote du Budget primitif 2026.
Sur le management aussi…
Voilà un autre point très intéressant, car il faut recadrer qui fait quoi dans une commune. Oui, la grande problématique dans les fonctions de cadre A est… le mélange des genres.
En l’espèce lorsque vous avez un nouvel édile, même en cours de mandat, la bonne pratique est de prendre un collaborateur à sa main pour le nouveau maire, pas de reconduire ou de laisser l’ancien maire choisir pour son successeur. On a tant décrié le rôle d’Emmanuel Macron dans le choix des directeurs de cabinet de ses 1er Ministre… Chose faite, puisque « Michel Véniat m’a recruté pour ce poste (fonctionnel) de Directeur de Cabinet. »
Ensuite, rappelons que le rôle d’un « Dir Cab » est celui d’un conseiller politique, pour la construction d’une stratégie et d’une communication politique associée, voire d’un programme de campagne électorale, point ! Par contre, la conduite du management d’une collectivité locale, et par suite des Ressources Humaines, est de la compétence exclusive du DGS (Directeur Général des Services). D’ailleurs, le Droit du travail est bien fait, le Directeur de Cabinet occupe un poste fonctionnel qui s’éteint automatiquement avec le mandat du maire, le DGS occupe, pour sa part, un emploi de fonctionnaire permanent territorial ou local. Evidemment, la superposition des compétences, d’empiétement sur le périmètre de l’autre, est un très grand classique du genre. Pour autant, aucune de ces fonctions ne peut, conformément à la loi, piloter toutes les compétences à la fois. C’est normalement un principe intangible… !
Sur Douchy-les-Mines, vous avez donc eu également un psychodrame où les compétences de chacun n’ont pas été respectées ; la presse et les élus d’opposition ont longuement relaté le conflit entre le Directeur de Cabinet, Oussama Mouftah, et le DGS sur Douchy-les-Mines, Mohammed Abdoune, avec une décision sans appel de Michel Véniat pour l’éviction du DGS. Cette procédure a été décriée par l’ensemble de l’opposition. Tout cela nous ramène au climat au sein de cette collectivité locale. « L’Audit de la CG 59 afin d’évaluer le bien être (ou pas) des agents publics est achevé. Nous aurons les résultats très prochainement ! », précise le Directeur de Cabinet.
Et encore, ce résumé ne parle pas des aspérités hebdomadaires entre les figures politiques locales, voilà un portait de ce décorum extrêmement complexe à l’aube d’un scrutin municipal explosif sur une commune, dans le Denaisis, de plus de 10 000 habitants. Sans hésitation, on peut affirmer que cette élection sur Douchy-les-Mines sera scrutée par tous les observateurs politiques locaux, régionaux et nationaux… !
Daniel Carlier
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